LE GRAND TOURISME AU SAHARA
Photographies A. Bougault

----------------------======0000O0000======--------------------


Deux itinéraires de tourisme au cœur du Sahara.

Chaque année, à l’époque où finissent les beaux jours en Europe, le Sahara ouvre aux touristes son immense domaine ensoleillé. Le Hoggar en est le centre attractif.
Ce Hoggar, le Blad el Kouf ou « pays de la peur » des Arabes, n’est plus, grâce aux moyens rapides de communication, qu’à quelques jours de Paris en automobile et à quelques heures, ou presque, par avion. On parvient sans sérieuses difficultés à franchir la double ceinture de sables et de roches qui le tient isolé. Grâce à un réseau de pistes judicieusement organisé et perfectionné chaque jour sous l’active administration des territoires du Sud, les automobiles de tourisme et les avions peuvent en sécurité parcourir ou survoler le Sahara. La plus récente de ces pistes passe par l’Erg oriental, d’Ouargla à ln Eker. Elle forme, avec celle qui longe l’Erg occidental par El Goléa et In Salah, un circuit de plus de 5 000 kilomètres d’Alger à Alger sans revenir sur ses pas. Pour les avides d’espace, quelques variantes s’offrent encore sur ce vaste circuit : à l’est vers Ghadamès et Djanet, à l’ouest sur Adrar et Timimoun.
En arrivant d’Alger par Constantine, Biskra et Touggourt, c’est à Ouargla que l’on aborde le grand désert. Fort Lallemand est la première étape. On s’y repose et l’on s’y ravitaille avec l’aide dévouée des gardiens indigènes. II faut ensuite gagner Fort Flatters d’un seul bond, par le Gassi Touil. Quelques centaines de kilomètres sur un tapis de sable fin entre les lignes nettes d’un horizon circulaire, puis le passage dans de longs et larges couloirs bordés de hautes dunes claires, qui ressemblent à des îlots de cristal dans la lumière éblouissante. De distance en distance, des balises d’aviation et des terrains d’atterrissage.


Une borne kilométrique sur le Gassi Touil

La borne d’Hassi Tartrat apparaît bientôt : amas uniforme de pierre et de gypse, point blanc isolé veillant en sentinelle sur une étendue fauve aussi vaste que plusieurs départements. Elle indique aux voyageurs la direction et la distance à franchir pour atteindre le puits que le gouvernement général a fait creuser récemment. L’arrivée en vue de Fort Flatters par un plateau pierreux est saisissante. Des hautes falaises à pic, le regard plane sur un paysage exclusivement saharien. L’oasis, de quelques palmiers, est au creux de cette dépression du sol, le fort s’élève à mi-côte sur le versant opposé.


Le puits d’Hassi Touareg, sur le Gassi Touil
À gauche, petites pyramides de mortier destinées à jalonner la piste qui
suit un véritable tapis de sable de plusieurs centaines de kilomètres,
coupé çà et là d’une borne ou d’un puits

Le grand Erg oriental a pris fin. Le pays targui commence avec la vallée de l’lgharghar : montagnes noires, arbres épineux, hommes voilés. Le poste d’Amguid est en pleine organisation militaire et touristique. Une société pétrolière vient d’y installer des pompes qui débiteront l’essence comme sur une route quelconque de France.


Mise en place des grandes cuves d’essence et d’une pompe au bordj
d’Amguid pour le ravitaillement des autos et avions de tourisme

Entre ln Eker et Tamanrasset s’étend le plateau granuleux de Tefedest, dominé par de hautes montagnes, car l’on approche du Hoggar. C’est aussi la région des mirages. On a l’illusion d’être entouré de marécages, bien que le sol soit parfaitement sec. Bientôt apparaissent sur la gauche les hauts pics de l’Ilaman et du Tahat, qui culminent à 3.000 mètres et se détachent sur le ciel limpide. On passe à Tit, lieu du combat historique qui, en 1902, nous ouvrit le Hoggar et châtia les Touareg de leur coup de main sur la mission Flatters. Tamanrasset a été souvent décrit : tous ceux qui y viennent ne manquent point de saluer la tombe du Père de Foucauld et du général Laperrine.
Pour atteindre les hauteurs de l’Atakor on emprunte l’oued Tamanrasset. On se trouve aussitôt engagé dans le dédale des pitons et des plateaux tabulaires de l’Ihagen Tendi et du Tilaous. On atteint ensuite les gorges de Toughoumout et l’oued du même nom jusqu'au pic du Tezouïa. II n’y a plus, jusqu’au faite de l’Asekrem, qu’un sentier de pierres croulantes où les chameaux circulent difficilement. Le plateau de l’Asekrem, où le Père de Foucauld avait établi son ermitage d’été, est à une altitude supérieure à 2.800 mètres. On y a une vue magnifique sur le massif entier, labyrinthe de sommets et de gorges. De là, les ascensionnistes ont le choix des pics dont ils peuvent tenter l’escalade à l’aide du piolet et de la corde, et c’est une curieuse sensation de retrouver ainsi au cœur du continent africain les mêmes émotions et les mêmes joies sportives que dans les Alpes.


Le massif de l’Atakor, vu du plateau de l’Asekrem
(ermitage du Père de Foucauld), à 2.810 mètres d’altitude

 


Un aspect saharien, près de Fort Flatters
Le passage est entaillé dans la falaise du plateau qui marque
la jonction des pistes de Flatters, d’Amguid et Fort Saint Ghadamès



Un effet de mirage sur le plateau du Tefedest, devant
les premiers contreforts de la Garet el Djenoun (2.770 mètres)
C’est à tout instant, le long des pistes suivies et sur des terrains entièrement secs,
que ces immenses lacs apparents se présentent aux yeux du voyageur