Je me souviens...
TABDT
et scorpion
Alain BROCHARD – 63/1 – Technicien radio –
Base Aérienne 167
Rien à voir me direz-vous et pourtant !
Le jour de la TABDT était arrivé et nous étions convoqués à l’hôpital.
Après une première expérience de ce style de torture, (découverte alors que nous étions gamins), puis la deuxième séance au moment des « classes », nous étions à pied d’œuvre pour le troisième « schoutage ».
Le casernement de la BA 167, n’étant qu’à quelques encablures de l’hôpital, nous avions eu pour consigne, de nous rendre à pied sur les lieux du massacre. Quant au retour, les dispositions seraient prises en fonction de la résistance de la troupe.
Plusieurs solutions pouvaient se présenter :
– Retour par ses propres moyens, (à pied, même s’il fallait terminer en rampant).
– Le 4x4 pour les plus fragiles.
– L’hospitalisation pour ceux qui à la vue de la seringue, (et quelle seringue, une pour un régiment bien sûr), avaient préféré « tomber dans les dattes » que de regarder le spectacle ! (À Reggan je n’ai jamais vu de pommiers !)
Nous fûmes quelques uns à rentrer à pied, il était sur le coup des dix heures, le soleil avait attaqué sa course vers le zénith, il ne fallait pas s’attarder et le plus court chemin, en passant par derrière l’hôpital, serait le bon pour rejoindre nos « piaules ».
Finalement dans notre traversée fantastique personne ne manqua à l’appel, tous déjà au plumard, lorsque le reste de la troupe acheminée par véhicule arriva aux « fillods ».
Puis ce fût le repos, repas très allégé, nous eûmes droit aux oranges « sans passer par la case prison ». Bien entendu, l’un d’entre nous, dont le nom m’échappe, originaire de Quimperlé, n’en pouvant plus de boire du bouillon et manger des oranges, se jeta sur le saucisson qu’il finit par partager avec les infirmiers, venus le récupérer pour un petit stage à l’hôpital. Sinon tout se passa dans le meilleur des mondes.
Tous ceux qui ont connu la joie de la vaccination à Reggan peuvent en témoigner aussi bien que moi.
Mais, vous me direz, pourquoi faire allusion aux scorpions dans le titre de ce propos ? Vous savez pourtant tous, que les scorpions aussi avaient droit aux « soins infirmiers », lorsqu’il s’agissait de les conserver !
Guy MORVAN, que je me permets de citer pourrait en témoigner plus que moi !
Alors que nous étions tous affalés sur nos plumards et qu’un frugal dîner nous était apporté, un de nos camarades qui lui, avait passé sa journée en permanence arriva sur l’entre fait. Refusant de partager notre pitance, réjouit d’aller festoyer à la cantine il nous lâcha avec le sourire de celui qui pourrait manger du saucisson et même du « à l’ail » s’il vous plaît.
À son retour, nous l’attendions tous, lui annonçant qu’il ne devait pas désespérer car le sergent de semaine venait de nous prévenir que pour lui ce serait le lendemain. Et oui, les infirmiers ne devaient pas perdre la main, entre ceux qui avaient été oubliés ou « ceux qui passant trop près de l’hôpital ?? », tous pouvaient y avoir droit ! Je plaisante !!!
Le lendemain matin, convoqué pour neuf heures, notre homme prenant son courage à deux mains, se dirigea donc vers « l’hostau ». Quelques temps après, à notre grande surprise, le gaillard nous revint en pleine forme, vacciné pour le pire et le meilleur. Il se mit au lit, respect des consignes oblige et commença une sieste réparatrice. Repas de midi ingurgité, nous attaquions l’après-midi sur le même rythme, tout en ayant noté que notre ami fatigué par l’injection ne s’était pas réveillé pour le repas.
Le soir venant, le repas aussi, nous commencions tous par reprendre la forme, oubliant un peu notre copain toujours endormi, profitant au maximum de ce sommeil réparateur. La soirée se passa comme à l’accoutumée et la télé « n’arrivant pas » encore à Reggan, les jeux de cartes pour certains, les bouquins pour d’autres furent de sortie, jusqu’au moment où le marchand de sable, et à Reggan on n’en manque pas, nous entraîna dans les bras de Morphée.
Quand tout à coup à l’autre bout de la « fillod », l’alerte fût donnée. Les compagnons de chambre du dormeur, inquiets de ne pas voir ce dernier ouvrir même une demie paupière, se mirent à le secouer sans succès. Ne craignez rien, le patient respirait encore, sommeil du juste ou pas, nous le saurions bientôt.
Le sergent de semaine prévenu que notre homme ne se réveillant plus, appela de toute urgence nos hospitaliers, qui d’un coup de jeep arrivèrent en trombe, toubib en tête.
Après s’être fait raconter par les collègues de chambrée l’histoire de notre « hibernatus », comme quoi même au Sahara !!!
Le toubib dit en maugréant :
– Les c..s, ils lui ont fait une anti-scorpion ! Bon rien de grave, quand il se réveillera vous me le renvoyez, on lui refera la bonne injection.
Sur ce il reprit la route de l’hôpital, sans penser un moment au malheureux qui se réveillerait bientôt.
En effet, le lendemain matin notre homme était en pleine forme, réveillé aux « cliquettes ». Il se demandait pourquoi nous avions encore du mal à nous lever.
Sachant que notre ami était enfin sorti de sa léthargie, tous, autour de lui dans un même élan, il lui fût annoncé… qu’il n’avait pas eu la bonne piqûre et qu’il fallait y retourner. À ce moment dans « un élan de grande lassitude », il se recoucha de plus belle se disant sans doute qu’il lui fallait encore un peu de repos avant d’affronter à nouveau les as de la « piquouse ».Alain BROCHARD – Mars 2008