Je me souviens...
« La RAFALE » et « l'INOX »
Michel
MARIET – 60 2/A – 711ème Compagnie
de Transmissions
« L’Inox » ce train « rapide » qui mettait une journée pour relier Perrégaux à Colomb-Béchar, environ 650 km, alors que « la Rafale » effectuait le même parcours en 2 jours, un train que l’on n’oublie pas quand on a eu l’occasion de voyager avec.
Je vais vous raconter mon voyage offert par l’Armée début janvier 1962 où après une croisière en 4ème classe entre Marseille et Oran, nous devions continuer par le train pour nous rendre à Colomb-Béchar et ainsi grossir l’Armée Française et une certaine 711ème Compagnie de Transmissions qui devait m’attendre avec impatience.
Après quelques jours de remise en forme au D.I.M. d’Oran nous avons rejoint la gare afin de prendre le train régulier Oran – Alger, en une heure nous étions descendus à Perrégaux où nous passions la nuit avec nos bagages que nous appelions pompeusement paquetage. Lendemain matin, départ très tôt afin de passer les gorges de Mascara de nuit, et découverte de notre train « la Rafale » pour nous rendre à Colomb-Béchar sur une voie étroite de 1 055 mètre de large.
Description de « la Rafale », 2 ou 3 wagons plats avec des sacs de sable (dispositif anti-mines) ensuite 1-2 voire 3 locomotives diesel, joliment décorées de plaques de tôle faisant office de blindage parsemées de nombreux trous de balles qui pouvaient servir à l’aération des moteurs. Ces locos permettaient de tracter l’ensemble du train à des vitesses proches des 30 km/heure sur le plat !!! Ensuite nous avions les wagons de marchandises qui devaient transporter du matériel, et autres marchandises. Pour faire voyager la Troupe, l’Armée utilisait des wagons à bestiaux avec une inscription sur chacune des portes coulissantes :6 chevaux en long
ou
28 hommesPour les chevaux il y avait de la paille, pas pour la Troupe car il y avait eu des incendies de wagons par des mégots mal éteints. De toute manière, dans la journée nous étions nombreux sur les toits de ces wagons à commencer notre bronzage. Enfin le train se terminait avec un wagon provenant d’un film de western où nous nous attendions à voir descendre John Wayne, mais qui était réservé aux officiers de notre belle armée.
Cette deuxième journée nous permettait de faire Perrégaux – Aïn-Sefra, environ à 400 km en 14 heures. Nouvel hébergement nocturne dans des baraquements qui ne ressemblaient même pas aux cases du Club Med. Enfin le troisième jour, après 8 heures, nous avions parcouru les derniers 250 km, nous arrivions, dans nos conforts respectifs, à notre destination finale Colomb-Béchar. Nous étions à la porte du Sahara ! J’allais oublier la restauration, je plaisante car nous avions nos boîtes de rations à déguster froides.
Après l’indépendance de l’Algérie, les autorités algériennes ont interdit « la Rafale » pour le transport de la Troupe, nous devions tous voyager dans « l’Inox » où nous pouvions nous prélasser sur de confortables banquettes en bois. Ce train ne contenait pas un gramme d’inox, les voitures en bois étaient peintes avec du minium blanc ce qui permettait de loin et surtout de très loin de lui donner cette apparence de l’inox. C’est dans ce train, début octobre 1962 que j’ai fait mon retour vers Perrégaux et ensuite Oran – Port-Vendres et enfin Paris. Tous les libérables qui revenaient du Sahara et de Colomb-Béchar débarquaient en général avec un animal, souvent un dob ou dabb (uromastix), mais aussi des fennecs et plus rarement des vautours et autres chacals. Le soleil avait du nous taper sur la tête ! Pour information cette ligne de chemin de fer étroite (1 055 m) à voie unique a été construite en 29 ans, entre 1877 et 1906, elle allait du petit port d’Arzew à l’oasis de Colomb-Béchar soit 711 km. Vers 1914 cette ligne fut prolongée en direction de Kenadsa à une quinzaine de km au sud de Colomb-Béchar afin de permettre l’exploitation du charbon qui alimente encore maintenant la centrale électrique. Les trains de voyageurs, au temps de la vapeur, mettaient 21 heures pour rejoindre Oran depuis Colomb-Béchar, en 1948 avec les locomotives diesel la durée du trajet était réduite à 17 h 30. Si cet article permet à certains de revivre des moments forts et qu’ils ont conservé des photos de ces trains, je serais heureux de les recevoir pour les ranger avec mes souvenirs.
Michel MARIET – 11 octobre 2008Merci à Jean-Claude MOUROT de nous avoir fait parvenir ces photos.
13 octobre 2008
Vue d'une locomtive du train « la Rafale » sans les plaques de blindage
Jolie photo du wagon « western» prise début 1960.
Devant ce wagon on aperçoit la Troupe
dans les wagons à bestiaux
Michel MARIET – 29 décembre 2011
Le train à Colomb-Béchar
Guy GIRAUD Employé à la compagnie des Chemins de Fer du MER-NIGER
1954-1962
Presque tous les militaires qui sont allés passer quelques temps dans le sud ont été acheminés, entre Perrégaux et Colomb-Béchar, par « LA RAFALE » ce sympathique tortillard qui circulait sur une voie étroite. Dernièrement j’ai eu une longue conversation avec un fidèle du site http://www.3emegroupedetransport.com/. Pour Michel MARIET c’était le seul train qui alimentait Béchar en homme et en nourriture.
Entre 1954 et 1962 j’ai été employé à la compagnie des Chemins de Fer du MER-NIGER, train à voie normale. Plus communément les habitants de Béchar connaissaient cette gare sous le nom de « Gare du Maroc ».
Cette ligne quittait Béchar à la hauteur du dépôt de carburant, se dirigeait vers le monument Leclerc où elle rentrait au Maroc. 420 kilomètres séparaient Béchar d’Oujda. Du Maroc les marchandises, principalement la houille de Kenadsa, partaient sur Oran ou Alger pour alimenter les centrales électriques ou les usines à ciment.
Cette ligne a été prépondérante pour assurer l’approvisionnement de toute l’armée du sud Oranais. Beaucoup de véhicules des compagnies de transport transitaient, entre les ports du nord de l’Algérie et Béchar, par cet itinéraire. Quatre-vingt-dix pour cent des canettes de bière de la BAO et une grande partie du carburant pour tous les transports, suivaient le même chemin. Tout le ciment qui a servi à construire les pas de tir d’Hammaguir ou le socle de la base atomique de Reggan est passé par cet itinéraire. Les trains qui circulaient sur cette ligne étaient tirés par des machines Baldwin des chemins de fer marocains, ils étaient limités à 1250 tonnes brutes.
Cette ligne se poursuivait sur Kenadsa et Bidon II uniquement pour la desserte des mines de charbon et sur Abadla pour des trains mixtes charbon et voyageurs.
La « Gare du Maroc » n’existe plus, la ligne a été déposée. Par contre la population actuelle a conservé le nom « Gare du Maroc » pour désigner ce lieu-dit.
Guy GIRAUD – 13 novembre 2008