LE SOUTHERN CROSS MINOR EST ARRACHÉ AU DÉSERT

 

Quelques rappels :

    – En avril 1933, le Capitaine William Newton Lancaster se crashe à 300 km au Sud de Reggan en essayant de battre le record Londres >>> Cape Town.

    – Bill écrira ses 8 jours d’agonie sur ses carnets de vol.

    – En février 1962, le Groupe Saharien Motorisé du Touat, commandé par l’Adjudant Titus Polidori, retrouve par hasard l’épave de l’avion ainsi que le corps momifié du Capitaine Lancaster.

    – Dans les jours qui suivent, la dépouille mortelle de Lancaster est ramenée à Reggan par la Brigade de Gendarmerie de « Reggan-Ville » commandée par le Maréchal des Logis Paul Bretez.

    – En novembre 1975, une expédition est décidée par Wylton Dickson et Keith Schellenberg, pour retrouver et sortir la carcasse de l’avion du Tanezrouft.

    – En février 1979, le Southern Cross Minor est effectivement ramené en Angleterre.

    – En mai 1979, après un minimum de restauration, l’avion de Bill Lancaster est exposé à Londres.

    – En janvier 1980, le Southern Cross Minor est de retour en Australie, il sera exposé une trentaine d’années au Queensland Museum à Brisbane.


J’avais déjà écrit que d’aller rechercher la carcasse de l’avion de Lancaster au cœur même du Tanezrouft serait une entreprise des plus folles.
Mais pourquoi cette recherche ?
Bill avait écrit le premier jour, le 13 avril 1933 à 5 heures du matin :
J’espère que les français me rechercheront, mais il sera difficile de me trouver car je suis en dehors de la piste.
Il écrit un peu plus loin :
Eh bien ! Ça sera un rude travail de sortir ce taxi du milieu du Sahara.

Bill, malgré ses blessures et le choc traumatique suite à son accident, avait parfaitement conscience des difficultés, d’une part pour le retrouver, d’autre part pour récupérer l’épave de l’avion.

Mais c’était sans compter sur le hasard, d’abord le Groupe Saharien Motorisé du Touat commandé par Titus Polidori, qui le 11 février 1962 pour éviter une zone de fech-fech, passe par ce coin perdu du désert retrouvant ainsi la carcasse du Southern Cross Minor et la momie de Bill.

La dépouille mortelle du Capitaine Lancaster est bien entendu ramenée dès le lendemain pour être inhumée le jour suivant à l’oasis de Reggan.
Le Southern Cross Minor recevra encore quelques visites dans les mois qui suivront. Pierre OTT y retournera à plusieurs reprises jusqu’en juin 1962, puis l’avion de Bill retombera dans l’oubli jusqu’en 1974.

En effet en 1974, Wylton Dickson, relancera la célèbre course internationale : UDT WORLD CUP.


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Comme il est possible de le voir sur la carte qui suit, le parcours est impressionnant, partant de Londres pour arriver à Berlin via la France, l’Espagne, l’Afrique, le Moyen Orient pour revenir par Moscou.
De nombreux équipages vont y participer dont Keith Schellenberg et Hamish Moffat.


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Le départ est donné et bientôt les participants vont se confronter à l’Afrique. Et surtout au Sahara redouté de tous.


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Sur la carte qui précède le parcours montre l’incursion Saharienne que les équipages durent affronter.

Un équipage Australien se démarquera brillamment sur cette épreuve effectuée sur Citroën DS 23, ce sera celui de André Welinski, Ken Tubman et Jim Reddiex le préparateur.


Source Internet


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Quant à Keith Schellenberg et Hamish Moffat, ils seront malheureusement disqualifiés.


Source Internet

C’est donc au cours de cette manifestation, lors de la traversée du désert, que l’on reparlera du Southern Cross Minor.


Extrait de « UNE JOURNÉE DE LÉGENDE » de E.P. DIXTED

Wylton DICKSON, l'organisateur du Rallye de cette Coupe du monde UDT, répondit avec enthousiasme : « Qu’il serait merveilleux d'être capable de récupérer l’avion et que cela pourrait devenir un mémorial national. Comme australien, moi-même je serais fier d'être impliqué dans cette entreprise ».


Wylton DICKSON

Australiens et Anglais se souvenaient de cet avion mythique que Sir Charles Kingsford Smith avait fait construire pour réaliser des vols longue distance, que lui-même avait abandonné pour raisons diverses. L’avion avait été revendu à la hâte au Capitaine William Newton Lancaster pressé d’en découdre avec Amy Johnson dont il espérait battre sans problème le record Londres >>> Le Cap…
Mais l’histoire en ayant voulu autrement, Bill Lancaster s’était écrasé avec le Southern Cross Minor au beau milieu du terrible Tanezrouft.

Wylton nous en parle longuement dans une interview réalisée en mars 1976 par le Sunday Times magazine.


Photo de l’épave

Voilà comment mon expédition a trouvé l'épave en novembre 1975, au milieu du Tanezrouft. Notre équipe comprenait 14 personnes et deux Land-Rover.

Len Deighton m'avait mis sur la piste de cette mission de récupération (du SCM Ndt).

Mon but était de retrouver l'avion, de le faire reconstruire et de l'envoyer en Australie, car c’était le seul Avro Avian biplan encore existant qui avait appartenu à monsieur Charles Kingsford Smith, de mémoire le plus brillant des aviateurs d'Australie.
Je n'ai eu aucune hésitation sur le fait d’être désigné comme le leader de cette mission. J'ai téléphoné à Keith Schellenberg et sa réponse fut : « Allons le chercher ».
Quand la patrouille française a découvert le Southern Cross Minor en 1962, son rapport donnait précisément la position de l'accident mais à deux endroits différents. Cela signifiait une recherche, avec une quantité de carburant et d'eau suffisante, pour explorer une surface de 2 000 km² dans une zone où il était interdit de circuler librement. Il n’était à aucun prix question de nous laisser quitter la piste, une fois reçue la permission d'aller vers le sud de Reggane. Les Algériens n’ayant aucune envie de rechercher des explorateurs perdus. (Wylton Dickson Ndt).

Le projet de Wylton Dickson, aidé de Keith Schellenberg, fut alors d’aller récupérer les pieux restes de l’avion. Le but était de ramener l’avion de Smithy (Charles Kingsford Smith) « à la maison ».
Déjà en 1972 selon E.P. Wixted, le Queensland Museum situé à Brisbane en Australie s’était penché sur l’étude de la possibilité de récupérer le Southern Cross Minor au Sahara.
Différentes Ambassades, (dont celle de France en Australie), furent sollicitées pour la consultation des différents documents et photos que les militaires français avaient pu réaliser en 1962 lors de la découverte du lieu où Bill s’était crashé.
Le dossier était « épais », mais aucune indication précise ne donnait le lieu exact du crash.

L’équipe de Wylton Dickson eut vite conscience que les recherches seraient laborieuses. C’est pourquoi de nombreuses heures furent nécessaires à l’étude des cartes et des différents documents.
Il était connu que la carcasse de l’avion devait se situer à l’Ouest du point kilométrique 296, selon une information de Titus Polidori, mais le PK 296 était-il bien à 296 km de Reggane ? Ce point ayant vraisemblablement été mesuré à partir de Bidon V. L’incertitude, d’une part, de ces mesures réalisées à partir d’un compteur de Dodge 4X4 en « miles ». L’imprécision, d’autre part, du fait du type de pneus de leur usure et de leur gonflage, ne pouvait signifier que la découverte de l’épave ne pourrait être qu’une « galère ».
Les Algériens eux-mêmes ayant dit, tant à Adrar qu’à Reggane, qu’il fallait être complètement fou pour se lancer dans une telle aventure.

De plus la Gendarmerie Algérienne n’avait aucune envie de se mettre à courir après ces pseudos aventuriers en perdition dans le Tanezrouft, au risque d’y laisser leur propre vie… Telle était la situation de l’équipe au moment de quitter Reggane.
L’équipe de Wylton Dickson était composée de 14 membres.

Quatorze d’entre nous étaient présents à l’important briefing de Londres. Il y avait Keith Carmody et Lloyd Fleming, respectivement président et vice-président du Club Aéronautique du Queensland Royal. Venait aussi de Brisbane le jeune couple Mat et Robyn Synnott qui avait économisé de l'argent pour se joindre à cette mission.
Deux cinéastes de Brisbane, Dick Marks et John Stainton, qui étaient arrivés par avion et il y avait le jeune Tom Wixted, dont le père Ted était le bibliothécaire du Queensland Museum. Il y avait le conducteur de notre deuxième Land-Rover, Graham Powell, un assistant cameraman, David Hankin, la femme de Keith Schellenberg Maggie et sa fille de 17 ans Sophie. Hamish Moffat devait être le copilote de Keith et le mécanicien en chef. Hamish avait conduit comme copilote avec Keith une Bentley 8 litres de 1930 lors d'un Rallye de Coupe du Monde. Il y avait également Keith et moi-même. (Wylton Dickson Ndt).

Après le briefing, l’équipe se retrouve à Eaton Square au centre de Londres. Deux Land Rover étaient nécessaires pour ce raid improvisé, le Land Rover de Keith Schellenberg flambant neuf et un Land Rover loué pour la circonstance avec son chauffeur Graham Powell.

Il y avait deux Land Rover au départ, le mien et l'autre appartenant et conduit par Keith Schellenberg. Comme le mien avait douze places, j'ai pris l'équipe de tournage australienne et d’autres passagers qui, y compris moi-même et Wylton, faisait une dizaine de personnes, plus leurs bagages et les vivres nécessaires, le tout représentant une lourde charge, y compris la totalité du carburant ! (Graham Powell Ndt).

Les deux équipages se retrouvent rapidement à Douvres, Calais puis Paris d’où ils repartent le lendemain matin pour Marseille.

Depuis Londres nous avions réservé la traversée pour l’Algérie de Marseille à Oran. Arrivés à Marseille nous apprenons qu'aucune traversée vers Oran n'était prévue. Nous devrions donc rester coucher la nuit et, si la chance était avec nous, nous pourrions traverser le lendemain vers Alger. (Wylton Dickson Ndt).

C’est alors que Graham et Wylton rencontrent un ancien Légionnaire qui leur confirme l’existence de l’avion plein SUD-EST de Reggane.
Par chance le groupe de Wylton Dickson réussit à embarquer 24 heures avant le départ pour Alger.

Nous avons réussi également à obtenir les seules cabines disponibles et avons pu passer la nuit dans un relatif confort. Nous en avons eu besoin du reste car le dédouanement à Alger a pris cinq heures. (Wylton Dickson Ndt).

À Alger, l’équipe en profite pour s’approvisionner en vivres supplémentaires et vérifier que tous étaient bien en possession des bons documents pour le voyage.
À souligner que Wylton s’était assuré des autorisations nécessaires auprès du ministre de l’Intérieur Algérien.
Le voyage reprend alors vers Blida où ils s’arrêteront pour la nuit.

Il faisait déjà nuit quand nous avons entrepris la traversée des Montagnes de l'Atlas et nous fûmes des plus heureux de découvrir, perchée sur une corniche, une Auberge Touristique très éclairée à deux heures environ de la ville.
Le sommeil cette nuit-là fut agité. Nous avons changé de conducteurs, ainsi nous avons pu sommeiller en roulant. Après la traversée de l'Atlas nous étions désormais proches du Sahara. (Wylton Dickson Ndt).


Mais le désert n’est pas encore là, le lendemain le groupe repart vers Ghardaïa après avoir traversé Laghouat. La nuit est courte et les premières lueurs de l’aube ne sont pas encore là lorsque les voyageurs repartent.

L'aube est arrivée en même temps que nous nous approchions de la ville de Ghardaïa dans une vallée délimitant une oasis colorée et animée. Ici, à l’Hôtel Transat, nous eûmes des bols de café de bienvenue, avec du pain français. À 2 heures de l'après-midi, le jour suivant nous avons atteint El-Goléa, à 270 kilomètres au sud. De là vers le sud-ouest jusqu'à Timimoun c'était plat et sans particularité et la nuit est tombée nous cachant ce paysage morne. Sur cette partie de 360 kilomètres il n'y avait aucun signe de vie et nous eûmes la joie d’arriver à Timimoun, mais il n’y avait pas de chambres de disponibles à l'hôtel, il nous fallut donc monter les tentes. Nous étions debout à l'aube et nous partîmes dès que possible. Bientôt nous fûmes en vue des grandes dunes de sable de cette région. Et grâce à une route agréable, à midi nous étions à l'Hôtel Jemila à Adrar. (Wylton Dickson Ndt).

Keith Schellenberg se présente au chef de la police… Pendant ce temps Wylton retrouve un vieil ami de Len Deighton. Ce dernier se rappelle avoir entendu parler d’un avion qui s’était crashé dans le Tanezrouft en 1933.

« Vous me dites que vous allez là-bas pour le retrouver ? Vous ne savez pas ce que vous dites. Entrer au Tanezrouft cela signifie mourir. Et en tout cas on ne vous le permettra pas ».
Je lui ai expliqué que nous n’allions pas mourir. Ce serait très difficile, j'étais d’accord, il fallait trouver la bonne route dans le Tanezrouft. « Vous êtes fous » a-t-il dit. (Wylton Dickson Ndt).

Keith revint disant que le chef de la police voulait voir toute l’équipe.

Nous avons été interviewés en français, nos papiers vérifiés et re-revérifiés. Le chef n'était pas un mauvais gars, mais il était vraiment vexé. Bien que nous ayons fait signer les papiers par son Ambassade à Londres, personne à Alger ne lui avait signalé que nous arrivions. Sa fierté avait été entamée, mais après un long moment de réflexion il a accepté. « Ici c’est un pays libre - vous pouvez y aller ». (Wylton Dickson Ndt).

Graham Powell rajoute qu’à Adrar vu le manque de stations services, l’équipe se réapprovisionne en carburant et tous les jerricans possibles furent remplis.
C’était la fin de l’après-midi et le groupe se préparait à partir pour Reggane, où serait installée la base arrière. Après plusieurs heures de route sur une piste en mauvais état l’équipe de Wylton s’arrête pour camper.

Quand nous nous sommes réveillés le lendemain matin nous avons découvert que l'oasis était d'une grande beauté. Elle était superbement irriguée et entourée par des palmiers luxuriants. Ce serait la dernière que nous devions voir pendant quelques temps. (Wylton Dickson Ndt).

C’était Reggane, la palmeraie que j’avais connue en 1963, magnifique oasis, perdue au beau milieu de ce Sahara réservant les plus belles surprises aux voyageurs à la recherche de paysages incontournables.

Reggan vue de
la palmeraie
(juin 1963)
Reggan point d’eau
dans la palmeraie
(juin 1963)
Reggan la Mairie
(juin 1963)
Clic sur les vignettes pour agrandir les photos

 

À Reggane, commissariat de police oblige, l’équipe fut traitée avec courtoisie. Il fut entendu que le groupe se diviserait.

L'équipe de tournage devrait donc partir pour essayer de trouver l’épave. En conséquence Keith et Hamish et j'ai pensé que seulement ceux qui venaient du Queensland devraient y aller. J’ai choisi de rester (à Reggane Ndt), avec Maggie et Sophie Schellenberg, Tom Wixted, qui avait la fièvre et Robin Synnott.
Le jour suivant nous sommes allés au poste frontière. Après plusieurs heures d’attente le départ vers le Tanezrouft fut autorisé.

J'étais debout avec ceux qui restaient et les Land-Rover une fois complètement chargés, étaient prêts à partir du poste frontière. À ce moment Matt le mari de Robyn décida qu'il préférait rester à Reggane. J'ai donc pris sa place immédiatement. (Wylton Dickson Ndt).


Effectivement Wylton, homme au grand cœur ne s’était pas imposé dans cette course pour aller rechercher les restes du Southern Cross Minor, le sort voulu malgré tout qu’il resta en première ligne. Son sourire au moment de la découverte de la carcasse de l’avion montre combien il était des plus heureux à pouvoir, de ses propres yeux, voir l’endroit où Bill avait agonisé quelques 42 ans plus tôt.

Les deux Lands Rover se dirigent maintenant vers le Sud, empruntant la piste Impériale, celle que Bill aurait dû survoler pour se rendre à Gao, mais l’histoire s’écrivit autrement…


Photo Graham Powell 1975

Le pilote volant dans une nuit sans lune ne pouvait que se diriger au compas vers cette destination que jamais il n’atteindra !

La piste est défoncée et rend le parcours chaotique, de plus la nuit tombe, mais malgré les nombreuses carcasses de voitures ci et là d’un côté ou de l’autre de la piste, le moral de nos aventuriers n’est pas entamé.

Il est vrai que les deux Lands Rover sont en parfait état. Keith Schellenberg a fait peindre en noir sur les côtés blancs de son véhicule :

SOUTHERN CROSS MINOR DISCOVERY EXPEDITION.

Bientôt le Poste Weygand est en vue.

C’était un endroit pour camper, mais à nous faire frémir. Les os de chameaux et de chèvres étaient entassés autour du vieux fort. (Wylton Dickson Ndt).

Photos Graham Powell 1975

L’équipe campe à quelques encablures des baraquements encore debout de ce qui s’appelle encore le Pk 250.


Photo extraite du film de John Stainton 1975

Le plan de route était simple, atteindre 36 Miles soient ~ 58 km, dans la diagonale, puis gouverner ensuite plein Ouest.
Dans un premier temps il était indispensable de découvrir les traces des militaires français et il avait été prévu d’explorer 2000 km² de désert.
Dans cette zone le terrain étant composé en grande partie de « REG », malgré les 13 années qui séparaient la découverte faite par les français, il n’était pas impensable de retrouver des traces de roulage de 1962.

Après avoir bivouaqué au Pk 250, appelé aussi à l’époque des français Poste Weygand (situé à l’embranchement Bidon V - Ouallen), les deux véhicules s’enfoncent dans ce Tanezrouft décrit comme le désert de la soif.


Photo extraite du film de John Stainton 1975.

Wylton Dickson et Keith Schellenberg avaient étudié préalablement tous les documents qu’ils avaient pu récupérer : cartes géographiques, données de l’Ambassade de France, sans oublier le livre de Ralph Barker dont la dernière partie était essentiellement consacrée au crash et aux Log Book et Fuel Book du Capitaine Lancaster.


Ralph Hammond Cecil Barker
Décédé en 2011


Mais où pouvait bien se situer l’épave du Southern Cross Minor ?
Le Capitaine Lancaster avait écrit sur son Log Book en avril 1933, qu’il pensait être tombé à 20 miles à l’Ouest de la piste Transsaharienne.
En 1962, nous saurons, par les militaires français qui étaient allés sur place, qu’en réalité le point crash se trouvait à 70 km direction Ouest du Pk 296 de la Piste Impériale.
D’autres informations seront contradictoires, d’où la prudence de Wylton Dickson pour situer précisément l’endroit.
Les conclusions de Wylton et Keith étaient que la direction à prendre à partir du Poste Weygand, ne pouvait être que le Sud-Ouest suivant une orientation déterminée, l’azimut 130.


Photo extraite du film de John Stainton 1975

Ceci correspondait à un angle de 50° Sud-Ouest par rapport au Nord.
Il fut décidé de parcourir 36 miles, soient ~ 58 km, dans cet axe.
Ensuite, le cap serait mis à l’Ouest et au bout de quelques kilomètres il serait nécessaire de marquer un point de repère, « un cercle de sable », pour pouvoir se resituer facilement. (J’oserai rappeler qu’en 1975 le GPS n’était pas encore d’actualité).

Comme il faisait de plus en plus chaud, l'horizon a grandi nous semblant plus proche.
Nous avons tracé un grand cercle pour marquer notre point de retour et nous mettre en route sur notre grille de recherche. Le plan était simple. Voyager 25 kilomètres plein nord, avec Hamish à un kilomètre sur notre gauche. Il s'arrêterait à 22 kilomètres et nous serions toujours en vue l'un de l'autre. L'après-midi nous avions couvert près de 800 kilomètres carrés avant le retour au centre de notre cercle de « sable ». (Wylton Dickson Ndt).

La carte avait donc été découpée en rectangles d’une vingtaine de km de long, chaque véhicule roulant à une distance maximum de 1 km de l’autre.

En route vers le point crash
Les traces de
Polidori (1962)

Photos extraites du film de John Stainton 1975


Précaution indispensable pour ne pas se perdre, je rappelle ici que la radio leur avait été interdite, d’où l’obligation de rester à vue.

De plus, pour augmenter les chances d’apercevoir au loin l’épave de l’avion, une personne était postée sur chaque toit.


Graham Powell sur le toit scrutant l’horizon
Photo extraite du film de John Stainton 1975

De retour au centre du cercle de sable, la conclusion était que l’épave ne se situait pas dans cette direction. La recherche devrait se faire désormais dans un autre axe.

Tous acceptèrent que le lendemain matin nous partirions de notre grille de recherche et explorerions d'abord vers le sud et ensuite vers l'est. (Wylton Dickson Ndt).

Néanmoins les deux véhicules rouleraient de concert sans se perdre de vue, chaque équipage ayant soin de scruter au mieux le terrain. Malheureusement le crépuscule était là. Les deux Land Rover étaient désormais en direction de l’Est lorsque : La lumière a diminué quand j’ai crié : « Stop. C’est ce que nous cherchons ». Trois traces distinctes, étaient devant nous plein Est. Comment diable se faisait-il qu'elles se dirigeaient vers le Sud ? Malgré le peu de lumière nous pouvions voir que ces traces avaient été faites par des véhicules plus lourds, empattements et pneus plus larges que notre Land-Rover. Était-ce le peloton motorisé français de 1962 ? (Wylton Dickson Ndt).

Le bivouac fut installé dans la proximité. Inutile de dire que la nuit fut courte et que le lendemain matin la plupart étaient levés aux aurores.

Keith était prudent. « Si ce sont les traces françaises, alors l'épave pourrait être à l'est ou à l'ouest par rapport au point où nous les avons vues ».

Nous avons calculé les quantités d'eau et de carburant qui nous restaient. Nous pouvions encore chercher un jour et demi avant d'abandonner notre exploration. Keith, Lloyd et moi retournerions sur nos traces, pour rejoindre l'endroit où nous avions croisé les traces de roulage que nous avions vues et nous prendrions à gauche sur 8 kilomètres.
Hamish tournerait à gauche vers l'Est sur 7 kilomètres, ainsi il serait à 1,5 kilomètre à l'Est, de nous. (Wylton Dickson Ndt).


Hamish au volant, Graham sur le toit, le premier Land Rover prit la direction de l’Est, puis environ 1, 5 kilomètre après le recoupement des traces vues la veille au soir, il reprit la direction Nord. C’est dans cette direction qu’ils trouveront les traces de roulage direction Est-ouest ainsi qu’un capot moteur du SCM.

Le lundi 17 novembre 1975, à 7.25 heures du matin (Dixit E.P. WIXTED), Graham juché sur son Land Rover apercevait enfin la carcasse du Southern Cross Minor.

Hamish stoppa son véhicule et le groupe attendit l’arrivée du second Land Rover qui déjà à l’horizon apparaissait plein Sud.

Keith Schellenberg était lui revenu en arrière pour « se coller » précisément aux traces de la veille et les suivre. C’est dans cet axe qu’ils retrouveront le second capot moteur à quelques 500 mètres du SCM.
C’était enfin LA JOURNÉE DE LÉGENDE, la carcasse de l’avion apparaissait dans le lointain. Keith, Wylton et Lloyd avaient devant eux comme dit plus bas, cette forme étrange et insolite que Titus Polidori avait aperçue treize ans plus tôt.



Le Southern Cross Minor, point insolite à l’horizon

Comme nous avons vu se dessiner au loin la structure du Southern Cross Minor, tout est devenu plus facile. Nous nous sommes serré la main. Et là, à quelque distance de nous, apparaissaient maintenant dans la lumière du jour les traces de roulage de la patrouille française, virant vers le nord comme nous avions fait, au moment où ils avaient aperçu cette forme étrange et insolite dans ce vaste désert où il n'y avait rien. (Wylton Dickson Ndt).


L’équipe de Wylton Dickson se trouvait désormais confrontée à l’environnement que Bill avait connu pendant les huit jours qui avaient précédé sa mort. Alors qu’il avait crié 42 ans plus tôt à cette immensité :


JE NE VEUX PAS MOURIR, JE VEUX DÉSESPÉRÉMENT VIVRE !


Carte des recherches recomposée à partir de l’interview de Wylton Dickson.

Dans le lointain apparaissait aussi le Land Rover de Graham arrivé plus tôt au point crash.


Photo extraite du film de John Stainton 1975

Arrivée de l'équipe sur les lieux du crash

En route vers le point crash
Les traces de
Polidori (1962)
Photos extraites de la page de témoignage de Graham Powell
http://www.3emegroupedetransport.com/POWELLGraham.htm


Le premier objectif atteint ce fut le recueillement en mémoire de celui qui avait espéré aussi longtemps que son âme avait pu le porter. Puis dans un dernier sursaut il avait souhaité le septième jour de son agonie : S’il vous plaît mon Dieu, une fin rapide.



Recueillement devant le SCM
Photo Graham Powell

Ce même jour Bill avait écrit qu’il souhaitait ne pas être oublié, formulant l’espoir que ses écrits soient retrouvés. L’histoire montrera qu’il fut entendu…

Le second objectif de Wylton était de ramener le Southern Cross Minor « à la maison », le moment était venu de démonter l’avion et d’en rassembler les pieux restes.

Les pieux restes du SCM



Graham Powell photographié auprès de son Land Rover
avec l’épave du SCM comme décor

 

Il faudrait charger l’ensemble de la structure dans les deux véhicules, les parties les plus encombrantes sur les toits. En effet la remorque que Keith Schellenberg avait prévue pour ce transport avait commencé à lâcher entre Timimoun et Adrar, le roulement incriminé ayant rendu l’âme à Reggane où resta définitivement cette remorque. Le démontage fut rapide, les écrous se desserrant au premier tour de clé.

Le moteur fut vidangé de son huile qui était toujours « propre », un puisard fut réalisé à cet effet. Les seuls dégâts apparents côté moteur étaient un trou dans le bloc où un support moteur avait été arraché lors du choc au contact du sol. (Graham Powell)
http://www.3emegroupedetransport.com/PanneduSCM2.htm
http://www.3emegroupedetransport.com/PanneduSCM3.htm

Dans son témoignage Graham nous parle aussi de la chaussure de Bill qu’il avait retrouvée et photographiée.


La botte de Bill retrouvée par Graham sera ensuite enfouie dans le sable.
Un petit coffret comportant une lettre dédiée à Bill par l’équipe de Wylton sera également enfoui sur le site du crash.

Ces vestiges restés dans les sables du Tanezrouft attendent désormais les prochains visiteurs.
La journée s’avançait et désormais il était temps de repartir pour rejoindre la Grande Piste avant la tombée de la nuit.
Après cette journée de légende, le silence du désert reprendrait le dessus dans ce coin retiré du Tanezrouft, le vent ne pourrait plus jouer avec la structure du Southern Cross Minor, tout redeviendrait comme près d’un demi siècle plus tôt.
Peu de traces marqueraient encore cet endroit où les dernières pensées de Bill inonderaient pour l’éternité l’espace temps dont quelques uns se souviendraient encore.

 

Le point crash après enlèvement de l’épave

Les deux Land Rover reprennent la direction du Poste Weygand, emmenant leurs équipages vers une civilisation oubliée pendant ces trois jours de recherches, dans la mémoire de celui qui les avait entraînés jusque là.

 


Les deux Land Rover repartant du point crash

 

Les deux équipages étaient désormais pressés de rejoindre la piste, ils étaient repartis dans la diagonale du Pk 250 en reprenant le même cap qu’à l’aller ce qui semblait logique.
Nous étions maintenant pressés. Nous sommes arrivés alors près de la piste avec la nuit qui tombait. Nous aurions pu camper, mais tout le monde tenait beaucoup à revenir à Reggane. Nous pourrions suivre nos traces de roulage, mais le désert joue des drôles de tours la nuit. Un moment vos traces sont là et instantanément elles disparaissent. Alors ces traces si peu visibles sur le retour, sont elles vos traces ?
« Nous devrions apercevoir le Poste Weygand dans sept minutes », dit Keith. Nous nous sommes mis à compter les minutes et la distance. Six minutes plus tard Keith donne un petit coup sur le volant, tandis que le Land Rover derrière nous reste en feux de croisement, pour éclairer les traces. Sept minutes et quarante secondes plus tard, dans le lointain, nous reprenons notre point de repère. Maintenant nous devons revenir vers le Nord et suivre la piste très exactement. C'est cahoteux et ce fut brutal. (Wylton Dickson Ndt).

Les deux véhicules filent désormais vers Reggane.
Quelques heures plus tard :
À notre droite nous aperçûmes les lumières scintillantes de la base nucléaire installée par les français. Nous étions dans la zone où les français avaient conduit leurs essais nucléaires de 1960 du fait de l’absence de vie dans le secteur. Après plusieurs heures de cahots et de secousses nous pouvions voir la lampe agitée par un policier de frontière. (Wylton Dickson Ndt).

Effectivement en 1975, Reggan Plateau était depuis déjà plus d’une dizaine d’années une base aérienne algérienne digne de ce nom. J’en profite pour dire que cette base a depuis ces dernières années été complètement remodelée.
http://www.3emegroupedetransport.com/EvolutionBasePlateau.htm


Les lumières dont nous parle Wylton ne pouvaient être que celles des immeubles métalliques juchés au Sud tout en bordure du plateau.


Photo Jacques OUDOIRE


La première question du policier fut « où est Monsieur Dickson ? »
Le retour à la civilisation commençait bien. Le plus dur avait été fait au cours de ces trois derniers jours où le groupe avait « couru » le Tanezrouft, mais le plus « difficile » restait sans doute à faire.
Rappelons-nous, Wylton avait pris au pied levé la place de Matt Synnot, ce dernier ayant préféré rester à Reggane auprès de sa jeune épouse.

Après le départ des deux Land Rover vers le Tanezrouft, les autorités de Reggane s’étaient aperçues que Wylton n’était pas avec le groupe qui était resté à Reggane, alors que son nom ne figurait pas sur la liste de ceux qui devaient aller au Tanezrouft.
Les ennuis commençaient et il semblait que malgré toutes les autorisations qui avaient été données en haut lieu, la hiérarchie locale ne voulait pas s’en laisser compter. D’autant qu’apparemment les communications n’étaient pas vraiment établies entre le ministère de l’intérieur Algérien et les territoires du Sud Sahara.
Graham écrit aussi dans son témoignage :

« Le responsable en chef de Reggane nous avait dit d’aller au Sud-Ouest de la piste transsaharienne et en quelque sorte il pensait que nous avions recherché l’épave de l’avion dans la zone Sud-Est, proche de la frontière du Mali ». (Graham Powell Ndt).

En effet, la position géographique où se situait le point crash n’était pas précisément connue des autorités locales. Le souci et l’inquiétude du poste frontière Sud de Reggane était principalement tous les trafics déjà en place à l’époque entre le Mali et l’Algérie, qu’il fallait éradiquer.

Dick Marks avait écrit en décembre 1975 :
Les appareils photos, les caméras, l’équipement furent saisis.
« Nous avons eu de la chance à cause d’une certaine prévoyance ». Nous avions préparé en cas d’ennuis, six rouleaux de films factices dans des boîtes étiquetées. Les militaires ont accepté deux de ces boîtes pensant qu’elles contenaient le film exposé. Si nous avions fait l’objet d’une fouille personnelle, nous aurions été dans de réels ennuis.
Quelques temps avant, ils avaient tué un jeune américain pour être en possession de marijuana.
(Dick Marks Ndt).

Graham ajoute : Nos passeports ont été confisqués et le responsable en chef considéra qu’il était obligé d’agir ainsi malgré toutes les autorisations obtenues du Ministre de l’Intérieur Algérien pour aller rechercher l’avion. Nous passâmes la nuit en résidence surveillée dans un bâtiment vide de Reggane. (Graham Powell Ndt).

Wylton Dickson continue :

Ce fut une nuit difficile pour nous tous et le matin nous nous sommes tous présentés courageusement au commissariat de police à 8 heures 30, heure où nous avions été convoqués.
Nous avons été ignorés jusqu’à 10 heures, lorsqu’un garde nous a dit : « Revenez à 12 heures 30 ».
De retour à l’heure fixée, même attente et à 15 heures il nous fut encore dit de revenir à 16 heures 30. Cette fois nous avons attendu et Keith alla parler dans un autre bureau avec un chef des plus désagréables. Nous entendions toute la discussion à travers des minces cloisons. (Wylton Dickson Ndt).

Le problème était :
Que la police avait 13 passeports dont cinq de ceux qui étaient partis dans le désert. Pourtant le groupe était de 14 personnes. Où était passé Monsieur Dickson ?
J’ai présenté mon passeport et j’ai expliqué comment j’étais parti dans le désert au dernier moment, laissant Matt Synnott à Reggane. (Wylton Dickson Ndt).

Le groupe fut alors renvoyé et prié de se représenter le lendemain matin à 8 heures 30. Le rendez-vous fut malgré tout fixé à 10 heures.

À 10 heures le lendemain :

« Nous irons voir mon supérieur à Adrar cet après-midi » a dit le chef de police.
Évidemment les fils du téléphone (Ndt) avaient bourdonné tout hier et ce matin. « Nous partirons à trois ». À 16 heures, une grosse tempête de sable s’est levée. Nous avons malgré tout attendu, ensuite on nous a dit que nous pouvions repartir. Nous devions rester à Reggane jusqu'à ce qu'un officier supérieur puisse venir d'Adrar.

Dix heures le lendemain matin on nous a dit de recharger sur les Land Rover les pièces de l'avion. Le représentant du gouvernement nous verrait à 11heures.
Une heure plus tard on nous a à nouveau donné l’ordre de décharger l'épave.
À 12 heures une éminence grise est arrivée. Nous étions désormais en présence de « M. Big ».
Il a examiné l'épave. « Vous appelez ces débris comme historiques ? » demanda-t-il ? « Bien sûr ».
« Vous allez partir maintenant à Adrar et aller au commissariat de police. Nous vous rencontrerons là-bas ».
Nous nous mettons en route pour Adrar où Keith avait déjà dû passer pratiquement cinq heures avec la police. Keith a estimé que, autant lui que moi, pourrions nous retrouver en prison.
En attendant, nous sommes tous retournés, à l'Hôtel Jemila. (Wylton Dickson Ndt).


Puis plus tard :

« Vous avez trouvé l’avion dans le Tanezrouft ? » Le chef était incrédule. Soudainement du vin fut apporté à la maison et un repas fut préparé pour nous. Nous étions des héros. « Mais vous êtes toujours tout à fait fous », a-t-il dit. Alors Keith est revenu avec nos passeports.
« Nous pouvons y aller », a-t-il dit.
« L'équipement et les films doivent attendre d’autres documents de douane. Il en va de même pour l'avion. Mais nous pouvons y aller ». (Wylton Dickson Ndt).

Graham dans son témoignage nous donne la suite de l’histoire qui était loin d’être terminée :

À Adrar l’avion et tout l’équipement photographique furent confisqués pendant que le « Chef » réfléchissait à ce qu’il allait faire de nous.

Wylton et Keith ont alors décidé que la plupart des personnes de l’équipe pourraient « s’en aller » ! Avec Wylton je suis parti avec un Land Rover, plein de passagers, à l’aéroport de Ghardaïa (très moderne à l'époque) où je crois qu'ils se sont envolés vers l'Italie (aéroport de Brindisi ?) Et puis ils sont rentrés « à la maison » !

De retour à Adrar (où le matériel, l’avion, l’équipement photos et Keith, Hamish Moffat et deux membres de l’équipe de tournage australien qui attendaient il y avait la plus grosse agitation…
« Où est toute l’équipe ? » a demandé le chef.

« Nous ne savons pas, ils se sont enfuis », lui avons nous dit !

Il était très en colère et nous a signifié de nous rendre à Alger pour rendre compte et remettre nos passeports de nouveau et où nous pourrions être « retenus ». Nous avons dû laisser tous les objets qu’il avait saisis, probablement pour toujours !

Nous avons ensuite pris le chemin du retour en voiture vers Alger.
Richard Marks, John Stainton, Wylton et moi-même sommes vite arrivés à Alger et Wylton nous a rapidement réservé des chambres à l'Hôtel Aletti. Mais avant nous nous étions signalés à l'une des autorités. Ensuite Wylton a dû s'adresser aux autorités pour arranger les choses, et les deux cinéastes ont été autorisés à prendre l’avion pour rentrer au Royaume-Uni.
Désormais, il ne restait juste que Wylton et moi-même...
Le lendemain Wylton m’a annoncé que les autorités l’avaient réprimandé pour ne pas avoir écouté les instructions données. Finalement « tout a été pardonné » et il nous serait possible de récupérer les caméras et autres équipements plus les films, mais pour l'avion… pas encore !

Wylton ensuite a proposé qu’il y ait en urgence une réunion de travail à Londres et tout fut à nouveau ok. Je devrais retourner seul à Adrar pour récupérer le matériel de tournage et on me dit : « si vous avez des ennuis, voici la carte de visite du deuxième secrétaire (Ghassan Zarifey) de l'ambassade d'Australie à Alger et il vous aidera si vous en avez besoin ! ».

Cette nuit-là j'étais assis seul dans le restaurant de l’Hôtel, Aletti me demandant si je devais faire de suite l’aller retour à Adrar.

Après quelques jours d’errance dans Alger, j’ai décidé de prendre la route vers le sud en direction d’Adrar comme la fois précédente, mais je pensais que je pouvais faire le parcours sans m’arrêter.
Mais au cours du trajet j’ai décidé de faire des haltes... ! Le premier arrêt fut à l’hôtel à Timimoun sur la route d’Adrar. Une fois à Adrar, je pus récupérer tout l’équipement mais pas l’avion et je suis reparti aussitôt.



Wylton avait parlé précédemment du Fort Mac Mahon qui était près de la route, donc par intérêt personnel, j'ai visité le fort, j’ai pris quelques photos et j'ai dormi à la belle étoile dans le désert à proximité de ce fort de la Légion.

 


FORT MAC-MAHON
Photo : Graham Powell Novembre 1975

 

J’ai ensuite continué la route du retour vers Alger jusqu’à l'Hôtel Aletti sans m’arrêter ! La seule chose dont je me souviens, c'est une pluie torrentielle alors que je me dirigeais vers Laghouat (selon les gens du pays, c’était la première fois qu'il pleuvait depuis de nombreuses années).
Après m’être reposé de cette longue route, j'ai pris contact avec Gassan et je suis allé à l'ambassade pour le rencontrer. Il a ensuite organisé mon retour en Angleterre, en passant par Paris (où je suis resté une nuit).
J'ai laissé la Land Rover dans le parking souterrain de l'hôtel Aletti et j’ai pris un taxi pour l'aéroport d'Alger avec tous les appareils photo argentiques, etc. Comme je vérifiais tous les bagages, il devint évident qu'il semblait y avoir quelque chose d’anormal...
Paniqué, j’ai immédiatement téléphoné à Ghassan Zarifey qui me dit « ne vous inquiétez pas, attendez là, NE BOUGEZ PAS ! » (Il ne faut pas oublier que je n'avais que 25 ans !).
Après une demi-heure environ, un convoi de voitures officielles arriva à l'aéroport, je pensais que c'était pour quelqu'un de spécial... Mais c’était pour moi ! Le chef du bureau d’Air France Algérie et Gassan Zarifey, accompagnés de leurs assistants, ont traversé l’aéroport en se dirigeant vers moi, tous mes bagages ont été enlevés par les intendants et j'ai été escorté sur le tarmac directement sur un vol Air France à destination de Paris !

En décembre 1975, Graham revient reprendre son Land Rover au parking souterrain de l’hôtel Aletti à Alger, en provenance de Naples puis de Tunisie.
Il repart ensuite vers Tamanrasset, Djanet, Djado, Bilma, Agadez et de nombreux autres endroits… Son Land Rover terminera son parcours en Afrique suite à une douloureuse rencontre avec un camion !!!
Graham a été très marqué par cette expédition pour la récupération du Southern Cross Minor… Il a conservé l’empreinte du Sahara, me répétant à notre dernière rencontre qu’il n’avait qu’une hâte c’était d’y retourner.
Il était devenu un ami proche de Wylton et de Nita son épouse, encore aujourd’hui le fait de parler de son aventure avec Wylton le rend nostalgique de cette épopée.

Quant au Southern Cross Minor, il ne sera de retour en Angleterre, via la France qu’en février 1979, après une lutte acharnée de Wylton Dickson avec les autorités concernées.

L’épave de l’avion sera acheminée en Écosse.
http://www.3emegroupedetransport.com/LeRetourduSCM.htm

 


Puis au Queensland Museum de Brisbane en Australie, en hommage à Sir Kingsford Smith pionnier de l’aviation australienne pour qui cet avion avait été construit.
http://www.3emegroupedetransport.com/LeSouthernCrossMinor.htm

Après une présentation d’une trentaine d’années le Southern Cross Minor sera placé dans les archives du musée où il finira son temps dans le plus grand des oublis, donnant quelque part raison à « Mr Big » qui avait dit en novembre 1975 à Adrar :
« Vous appelez ces débris comme historiques ? »


Sources : 
Sunday Times Mars 1976.
Internet, témoignage de Lloyd FLEMING 1975.
Courrier de Graham POWELL 2012

Rédaction et traduction : Alain BROCHARD - Mars 2014