La plus mortelle maladie sahariennne
:
la sécheresse
Bien sûr, on sait que trois cents jours
par an un courant d’air chaud
établit entre la mer Rouge et la zone fraîche des Açores
un rideau
infranchissable aux courants d’air humides, qu’ils viennent
du nord-est ou du sud-ouest !
Mais on voudrait croire au miracle, espérer que l’eau qui dilua
cette pellicule d’argile sur le sable reviendra alimenter les oueds et
refertiliser les sources. Pourtant en certains endroits il n’a pas plu
depuis treize ans !
le sable succède au sable : le sable règne où que vous
regardiez,
sur les 360° du tour d’horizon. La végétation a capitulé,
les dernières
herbes sont mortes et le chameau parvenu jusque-là s’est couché
pour ne plus se relever. Près de « l’arbre du Ténéré
» nom d’un puits
où les racines des épineux descendent à plus de vingt-cinq
mètres pour
chercher un peu d’eau, il y a beaucoup de bêtes mortes :
leur instinct les guide vers la margelle mais l’eau est trop profonde.
« Demande du lait à ta chamelle,
un fils à ta femme,
mais demande l'eau à Dieu seul. »
(Proverbe des Kel Agala)
L’eau ! L’Occidental s’indigne
de la qualité de celle qu’il boit
mais il en gaspille à profusion. Le Touareg qui en sait toute la valeur
savoure parcimonieusement le liquide rare, boueux et souvent fétide
qu’il transporte dans sa guerba, sans jamais adresser
le moindre reproche à qui que ce soit. Nous sommes les fils
d’une économie de gaspillage qui nous a fait la main prodigue,
le cœur sec, le caractère aigre. À titre propitiatoire il
nous faut faire
avec humilité ce nécessaire voyage au pays de la soif
si nous voulons savoir pourquoi des femmes, des enfants
et des hommes meurent à coté de puits taris pendant que nous laissons
déborder nos baignoires et que nous noyons nos jardins.
Et pourtant, que le Sahara devient beau dès que le ciel,
le prenant en pitié, lui accorde quelques ondées bienfaisantes
!
L'eau dort au fond de
puits trop profonds.
Malheur à qui n'a pas la corde nécessaire.
Le puits à margelle pose des problèmes
aux nomades.
Cet homme tient un dellou à la main. Il s’agit d’une poche
en peau souple tendue sur un cercle en bois auquel sont fixées
des cordelettes réunies au bout d’une même corde.
Un dellou contient de cinq à dix litres, mais les puits ont parfois
trente ou cinquante mètre de profondeur. Il faut alors une bonne
force physique pour remonter l’eau à la surface.
PHOTOGRAPHIES DE JEAN-MARC DUROU
ET JOËL JAFFRE
TEXTES DE HENRI-JEAN HUGOT
Alain CHUETTE - Septembre 2009