Aviation Magazine n°255 du 15 décembre 1958
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France



« Noratlas »a dix ans ! De cargo militaire, il est devenu un avion militaire utile dans tous les domaines


par Jacques CAMBU et Jean PERARD

 


Quoi donc ? Le « Noratlas » ? « Aviation Magazine » avait habitué ses lecteurs à des descriptions ou études retentissantes. Ils ont donc pris une certaine accoutumance aux « premières » de notre revue… Qu’est-ce que cela veut dire ?... Cela veut dire, tout simplement, chers lecteurs, que notre journal n’a pas assez dit de choses sur cet avion qui est beaucoup plus intéressant qu’il n’apparait. On peut reprocher au « Noratlas » d’être classique, de ressembler beaucoup au « Pocket » américain dont on nous a saturé de photos depuis tant d’années... On peut reprocher au « Noratlas » d’avoir des hélices et des moteurs à pistons...
On peut reprocher, on peut reprocher beaucoup de choses au « Noratlas », a priori. Mais, si l’on se penche un peu plus attentivement sur son cas, son existence, son développement, son avenir, on s’aperçoit bien vite que l’histoire de cet avion est bien attachante et tout aussi pleine de promesses. En bref, le « Noratlas » est en train de réaliser à l’échelle européenne, et en temps de paix, ce que le célèbre « Dakota » réalisa dans le monde en temps de guerre. Transport civil, transport militaire, transport utilitaire, transport en tous genres, le « Noratlas » est bien un des avions les plus utiles à l’homme que l’on connaisse actuellement. Et, lui, n’a pas eu besoin de guerre pour s’affirmer... Tout au plus, quelques escarmouches très locales ont fait valoir son efficacité comme transport militaire. Mais le « Noratlas » ne s’est pas contenté de transporter des charges de guerre ou des soldats et des parachutistes, il a rendu et rend encore d’immenses services dans le domaine civil. En un mot comme en cent, le Nord 2501 est un avion utile et lui-même, avec son histoire, nous a transporté... d’enthousiasme ! Cela commença à Chatillon-sous-Bagneux, où se trouve le bureau d’études « Noratlas » et son chef, Jean Calvy, avant de se poursuivre à Bourges.

    L’INGÉNIEUR en chef Jean Calvy est né le 2 février 1902. Ingénieur des Arts et Manufactures, il débuta dans l’aéronautique, comme beaucoup d’autres, au Service technique en 1928, avec le titre d’ingénieur sous contrat. Deux ans plus tard, il entrait dans l’industrie, à la société SECM-Avions Amiot. Il s’occupa alors, comme ingénieur en chef, du multiplace de combat Amiot 140 dont il dériva le type de série 143 en 1934. Puis, il établit le projet des bimoteurs types 340 et 370, l’un militaire, l’autre de record dont nos lecteurs connaissent bien les exploits (Cf n° 134). Nous étions alors en 1937 et la fabrication en série de l’appareil militaire, qui devint le type 350/351/354 fut entaillée et poursuivie jusqu’à la fin de la campagne de France, en 1940. Pendant que l’usine Amiot de Colombes produisait des Ju-52, Jean Calvy et son bureau d’études s’établirent à Marseille, où une petite usine fut achetée boulevard Michelet. Là, une vingtaine de personnes — qui n’ont d’ailleurs jamais quitté leur patron — travaillèrent sur des projets et avant-projets jusqu’à la fin de la guerre. Durant cette période, l’avion de record 370 et quelques bombardiers 350 furent équipés de moteurs Rolls-Royce « Merlin » et affectés, après modifications, à des liaisons d’outre-mer, notamment entre Marignane et Djibouti, avec Codos, Durmon et Combard, ce dernier devenu, depuis, directeur général de la compagnie UAT.
La guerre étant terminée, toute l’équipe remonta à Paris. L’usine de Colombes était devenue l’Atelier aéronautique de Colombes, usine d’État. Jean Calvy ‘s’y retrouva jusqu’en fin 1945, avec, notamment, M. Giusta qui dirige maintenant Sud-Aviation. L’usine de Colombes fut alors affectée à la SNCA du Centre et M. Suffrin-Hebert, directeur de la DTI de l’époque, demanda à notre homme d’entrer à la SNCA du Nord afin d’y renforcer le département « Études ». Jean Calvy gagna donc le « Nord » avec, bien entendu, ses fidèles des mauvais jours. Il ne fut pas longtemps à penser au fameux cargo « Noratlas ». À cette époque, chacun cherchait un peu sa voie et M. Calvy songea au remplacement du matériel en service dans l’armée de l’Air et chargé du transport. Cette notion de transport militaire avait fait de grands pas durant la guerre et il y avait sûrement quelque chose à faire dans ce domaine. Les avions utilisés jusqu’ici —C-47, Ju-52 — n’étaient pas spécialement adaptés à leur mission essentielle, ne serait-ce qu’en considérant les possibilités de chargement...

Le « Noratlas »

    JEAN CALVY proposa donc à l’état-major un projet de cargo militaire en 1947. Après discussions, un marché de prototype fut accordé en juillet 1948, il y a donc dix ans de cela. Le contrat portait sur deux exemplaires dont le premier reçut des moteurs Gnome-Rhône 14 R, malgré leur puissance un peu juste et, aussi, une longévité non encore affirmée à ce moment. En accord avec les services officiels, le second prototype fut donc équipé de moteurs anglais Bristol « Hercules ». Le premier prototype porta la désignation Nord 2500 et le second devint le Nord 2501. C’est sur ce type que porta la décision de commande en série. Le « Noratlas » remporta la compétition qui le mettait en concurrence par le Breguet « Mercure » et le SO-30C, version cargo du « Bretagne » bien connu. La commande intervint immédiatement à la suite des essais menés au CEV, soit en fin 1950. Le Nord 2501 avait été présenté à Brétigny dès son second vol... Les diverses étapes de la commande, marché de présérie, approvisionnements, outillages, etc., intervinrent dans le courant du premier semestre 1951.


Le Nord 2500, premier prototype, était équipé de moteurs SNECMA 14-R et d’un train principal aux jambes identiques interchangeables.

En 1950, le N-2500 volait avec ses portes arrière remplacées par une casquette.

Le premier avion de présérie sortait en décembre 1952. Il y en eut trois de cette présérie, après quoi une commande de série fut exécutée. Cette commande subit diverses vicissitudes : d’abord il y eut 160 avions, qui furent réduits à 80, soit la moitié, pour raisons de crédits, puis une nouvelle tranche de 40 avions, puis une autre de même importance, puis, dernièrement une troisième de 35 appareils, ce qui porte le total en carnet à 195 exemplaires, venant s’ajouter aux deux prototypes et aux trois avions de présérie. Ceci pour les avions spécifiquement militaires. Actuellement, il reste une bonne quinzaine d’appareils à construire sur ce programme. Ajoutons que la SNCAN a encore produit 25 « Noratlas »pour le compte de l’Allemagne, lesquels sont livrés et que, dans le domaine civil, sept avions ont été vendus à la compagnie UAT et trois autres à Air Algérie, auxquels viennent s’ajouter trois plus trois à Israël.
Quant à l’avenir du « Noratlas », il est vraisemblable que la série actuelle militaire, qui arrive en fin d’exécution, sera poursuivie par tranches en ce qui concerne l’équipement des forces aériennes françaises. De son côté, l’Allemagne entame la construction de 112 exemplaires dont le premier a été livré en septembre 1958, et il est question qu’une tranche supplémentaire d’une soixantaine d’avions suive la première commande de la Luftwaffe.

Un peu de technique

    LA caractéristique essentielle du « Noratlas » est de présenter une dissociation fonctionnelle entre la partie cargo et la partie aérodynamique. En effet, l’avion en tant que tel est constitué par la voilure, les poutres, les moteurs et les empennages, soit tout ce qu’il faut pour voler. Le fuselage est rapporté à cet ensemble, il ne participe pas aux efforts de vol et est donc susceptible de recevoir de grandes ouvertures et aussi des applications diverses. La grande ouverture arrière découvre entièrement le gabarit de la soute, laquelle peut ainsi recevoir, selon les circonstances particulièrement fluides du transport aérien militaire, aussi bien des charges fractionnées, qu’un véhicule ou objet correspondant à la charge utile maximum de l’avion et offrant l’encombrement maximum en une seule fois. De plus, contrairement aux avions classiques à ouvertures latérales, le « Noratlas » permet des largages importants en vol. C’est ainsi qu’un bulldozer léger pesant tout de même 4 700 kg a été largué et parachuté à partir d’un N-2501.
Les résultats obtenus avec l’avion militaire, du point de vue des performances, des qualités de vol, des possibilités d’emport, etc. ont incité les techniciens de la SNCAN à penser à une utilisation civile de l’appareil. Partant d’un cargo militaire, il n’était, bien sûr, pas question d’espérer concurrencer les appareils civils sur certains plans propres au transport commercial, luxe, confort, facilités, etc. Par contre, le fait que près de deux cents avions aient été construits sous forme de cargo garantissait un prix honorable par amortissement des outillages et montages de fabrication, en même temps qu’il garantissait la fourniture des rechanges et apportait l’expérience de très nombreuses heures de vol effectuées sous tous les climats possibles. On offrait donc aux civils un avion éprouvé, estimé, d’entretien connu et aux rechanges faciles. Cependant, pour obtenir le certificat de navigabilité nécessaire et, en même temps, augmenter la charge utile — qui devient, pour une compagnie, la charge payante — la SNCAN a été conduite à adjoindre deux petits turboréacteurs Turboméca « Marboré » II de 400 kgp chacun à la source de puissance initiale. Montés en bouts d’aile, ces réacteurs d’appoint ont permis de faire passer le poids au décollage du N-2501 de 20 600 kg en utilisation civile, à 23 tonnes. En même temps, le poids mort des réacteurs n’était pas tout à fait perdu puisqu’il venait délester la voilure en raison de sa position marginale, et également améliorer par un effet de panneau le rendement de cette voilure. C’est ainsi que naquit le Nord 2502, lequel vola pour la première fois le 1er juin 1955, au poids de 22 tonnes. C’est le 24 mars 1958 qu’il fut agréé au poids actuel de 23 tonnes au décollage. La compagnie UAT était à la recherche d’un matériel cargo pour le travail en Afrique, mieux adapté que les DC-3 classiques. Entrant en contact avec M. Calvy qui possédait à la compagnie d’anciens amis, les techniciens de TUAT apprirent ce que le Nord pouvait leur apporter, surtout avec le montage des « Marboré » en bouts d’aile. Ils firent confiance à l’ami Calvy et finalement, par tranches, achetèrent sept appareils N-2502 qu’ils avaient aidé à faire naître... Si les civils achètent des avions, c’est pour s’en servir et TUAT ne s’en priva pas. Si bien que le constructeur vit son expérience « militaire » se doubler d’une expérience « civile » fort précieuse. L’exploitation intensive des N-2502 en Afrique a permis d’étudier l’avion à un stade plus avancé, notamment en ce qui concerne le vieillissement, les incidents mineurs dus à l’utilisation maximum et de porter remède au cours des grandes visites. Ces enseignements ont permis d’apporter sur les avions militaires des améliorations qui ne s’étaient pas encore avérées nécessaires du fait de leur vieillissement moindre et de contenter tout le monde... Si les militaires avaient avantagé les civils en « essuyant les plâtres », les civils le leur avaient rendu en apportant le secours d’une expérience plus rapidement acquise, dans des conditions extrêmes... Dans son initiative heureuse, l’UAT a bientôt été suivie par la compagnie Air Algérie dont les trois N-2502 sont exclusivement employés au trafic pétrolier, à partir d’Alger.
    Voilà, pour le Nord 2502.


Le Nord 2501 de série, embarquant des soldats complètement équipés...connut aussi des utilisations civiles au service de la compagnie Air Algérie.

    Nous voici au N-2503, lequel ne tardera pas à devenir Je 2508 en lui faisant subir la même opération-réacteurs qui devait faire du N-2501 un N-2502. Le Nord 2503 fut établi pour voir si, avec des moteurs plus puissants que les « Hercules », on n’obtiendrait pas des résultats comparables à ceux du N-2502 à réacteurs d’appoint. On monta donc deux moteurs Pratt and Whitney R-2800 CB17 de 2.500 ch sur une cellule de N-2501 et on s’aperçut que l’avion restait inférieur aux avions de l’UAT... Si bien qu’on le dota de deux réacteurs après son passage au CEV, et avant de l’envoyer aux Indes sous le nom de N-2508. Continuant son effort dans le domaine civil, la SNCAN avait produit le N-2503 en tenant compte des désirs de certaines compagnies aériennes possédant un parc complet de moteurs CB-17 et leurs ateliers de révision et d’entretien. Ces compagnies sont encore prêtes à accepter le N-2503 — ou plutôt sa version définitive N-2508 — puisque sa mise en exploitation ne s’accompagne pas de la création d’un système de maintenance spéciale, celui-ci étant en place depuis que ces compagnies emploient des Douglas DC-6 ou Convair, ou tout autre avion équipé des mêmes moteurs CB-17. Quant aux réacteurs, ils ne posent pas de problèmes particuliers, leur longévité étant sensiblement la même que celle des moteurs, en raison de leur emploi restreint

 


Paysage arctique, paysage équatorial... Qu’il soit recouvert de neige ou écrasé par le soleil d’Afrique, le « Noratlas »
a toujours répondu avec totale efficacité aux missions demandées. Depuis cinq années, il a mérité son titre d’avion utile...

    Le Nord 2504 consiste en une version particulière du N-2502 civil. D’utilisation militaire, il possède les moteurs et les réacteurs du N-2502, mais sa soute est occupée par un aménagement d’entraînement aux missions de recherche anti-sous-marine. Contenant quelque 700 kilomètres de câblages électriques et une fortune en équipements électroniques et radar, il recevra 16 élèves en cours d’instruction. Le 2504 est un exemple frappant des possibilités offertes par la dissociation fonctionnelle dont nous parlions plus haut. Et, poursuivant cette démonstration, venait le Nord 2505 qui, lui, devait être l’avion ASM opérationnel, avec une soute spéciale, mais n’eut pas de suite. La formule 2505 avait, en fait, été projetée avant le 2504, mais des considérations de poids, de dessin nouveau de la soute, incitèrent à penser alors à une version d’entraînement de l’appareil, version qui fut commandée par la Marine, du moins sous forme de prototype. Le Nord 2506 résulte d’une étude visant à faire du N-2501 standard un avion de transport d’assaut et d’appui tactique en lui donnant des performances encore plus poussées d’atterrissage, d’utilisation des mauvais terrains, de rapidité de chargement, etc. Pour cela, on travailla, ainsi qu’on le verra plus loin, sur la puissance qui devint égale celle du N-2502, et sur l’efficacité des volets qui furent redessinés. Sur un autre plan, le train fut renforcé et doté d’un système permettant de le vider de son huile et ainsi d’abaisser la soute presque jusqu’au sol. Une commande de 50 appareils fut envisagée, puis annulée par manque de crédit. L’avion est toujours sur la brèche et doit entreprendre sous peu des essais sur mauvais terrains. II servira de cobaye en vue d’un nouveau programme de cargo dont il est prématuré de parler aujourd’hui.

L’avenir

    LA SNCAN ayant acquis une belle expérience en matière d’avions- cargos, elle en est devenue une sorte de spécialiste. Il est donc normal qu’elle cherche à tirer le maximum de cette expérience et à se prolonger dans cette voie. Divers projets plus ou moins avancés existent, avec, bien entendu, des turbopropulseurs. La SNCAN a l’intention de développer un nouveau cargo qui, avec deux Rolls-Royce « Tyne » afficherait sensiblement le double du poids total du « Noratlas » actuel et serait d’ailleurs d’une formule différente. Sa configuration, dans la mesure où il est possible d’en parler, se rapprocherait de celle des transports américains Lockheed C-130 et Douglas C-133A. Ses missions oscilleraient entre le transport d’assaut à petite distance ou les liaisons sur de grands parcours, ce qui laisse, entre les deux, une belle gamme d’utilisation !




DU TRANSPORT D’ARMES AU TRANSPORT D’ÂMES

    COMME la plupart des avions réussis, le « Noratlas » n’a pas tardé à connaître des développements multiples. Et, bien entendu, l’avion n’a cessé de prendre du poids et de la force. Les faits marquants dans l’échelonnement des versions de l’avion sont, dans le domaine utilitaire, le fait que les civils se sont intéressés à une production initialement exclusivement militaire et, dans le domaine technique, l’heureuse adaptation de réacteurs d’appoint en bouts d’aile. Ajoutons à cela deux changements de moteurs et nous aurons fait un tour grossier de la question. Voyons-en maintenant les détails.

Premier prototype : Nord 2500

    PILOTÉ par Claude Chautemps et Georges Détré, le premier des deux prototypes du « Noratlas » décolla de la piste de Melun-Villaroche le 10 septembre 1949. L’appareil était alors propulsé par deux moteurs SNECMA 14 R de 1 600 ch au décollage, entraînant des hélices tripales. Le train fut escamoté dès le troisième vol et le premier palier pleins gaz fut exécuté le 14 octobre 1949. Les essais furent alors stoppés par le mauvais temps et par des travaux entrepris sur la piste de Villaroche. Ils reprirent le 26 novembre 1949 et furent terminés aux premiers jours de décembre. Au début de 1950, l’avion volait avec ses deux grandes portes arrière démontées et l’on prévoyait alors des possibilités nouvelles de travail incluant le parachutage de charges lourdes. Entré au CEV le jeudi 20 avril 1950, pour essais officiels, le Nord 2500 fut présenté en public lors de la fête de l’air du 11 juin suivant, à Orly. Notons quelques caractéristiques extérieures : dégivreurs pneumatiques, un phare d’atterrissage et de roulement sur chaque demi-aile, noyé dans le bord d’attaque, gouvernes de profondeur et de gauchissement équilibrées par masses extérieures portées en bout de leviers- d’intrados et, surtout, deux jambes de train principal absolument identiques, donnant une certaine dissymétrie à l’avion, mais autorisant une interchangeabilité totale, solution déjà expérimentée sur le cargo léger Nord 2100 « Norazur » de 1947.


La soute du « Noratlas » est apte à recevoir une diversité de véhicules terrestres…


Le « Noratlas » est un avion utile, même lorsque les choses deviennent sérieuses. Lors de l’affaire de Suez son efficacité étonna nos partenaires anglais basés à Chypre.


Deuxième prototype et série Nord 2501

    LE second prototype du « Noratlas » vola le 28 novembre 1950 avec ses moteurs SNECMA « Hercules » construits sous licence Bristol. Ces moteurs entraînaient des hélices Breguet-Rotol quadripales. L’avion entra très vite au CEV et la commande de série fut passée en fin 1950, après essais officiels tout aussi rapides. On a vu précédemment les vicissitudes dont fut l’objet la commande initiale et aussi comment on construit toujours le N-2501 à Bourges aujourd’hui. L’Allemagne, dans le cadre d’accords internationaux européens, commanda également le N-2501 dont elle reçut 25 exemplaires français. La commande date de juin 1956 et la première livraison fut effectuée le 17 décembre 1956. En janvier 1958, les dix-huit premiers avions livrés- totalisaient 1 400 heures de vol et 2 500 atterrissages. Â la même date, les 135 exemplaires de l’armée de l’Air française avaient à leur actif 165 000 heures de vol et 150 000 atterrissages. Le 25ème avion français fut livré à l’Allemagne le 12 mai 1958, et le 26 août suivant, le premier « Noratlas » construit outre-Rhin volait à son tour. Et les travaux de série prennent bonne allure à la Flugzeugbau-Nord...
Depuis sa mise en service, le « Noratlas » a donné mille preuves de son utilité, tant au cours de missions militaires que lors de missions spéciales telles que le transport et le largage d’équipements à la mission Paul-Emile Victor au Groenland, ou le voyage à Sidney, en mai 1956, de deux N-2501 restant absents de leur base technique pendant deux mois, couvrant 84 315 km et totalisant 111 atterrissages. Quant aux appareils de la compagnie Air Algérie travaillant en affrètement pour les sociétés pétrolières et jouant les camions de l’air, parallèlement aux N-2502, ils totalisent des chiffres impressionnants dans une exploitation intensive.
Extérieurement, le N-2501 présente quelques différences avec le premier prototype. De plus, en cours de série, quelques modifications intéressant sa configuration ont été apportées. Le prototype avait abandonné son dégivrage pneumatique et était doté d’un système thermique dans lequel l’air, destiné à être réchauffé par des brûleurs Avialex, était fourni par des entrées d’air fuselées montées au milieu de l’empennage horizontal et en bouts d’aile. Cette dernière disposition laissa croire, un instant, que des réacteurs avaient été montés, mais cela ne vint que plus tard... Pour finir, les appareils de série revinrent au dégivrage pneumatique Goodrich. Les deux phares ont été groupés sur la seule aile droite. L’équilibrage des ailerons fut identique à celui du N-2500 jusqu’au vingtième avion de série, après quoi il fut remplacé par le logement des masses dans le bord d’attaque même de la gouverne. On travailla également sur le débattement de ces ailerons, une solution définitive intervenant à partir du 26ème appareil. De même les surfaces des tabs de gauchissement furent réduites, un tab commandé persistant sur l »aile droite. La version civile utilisée par Air Algérie voyait son équipement radio modifié, les installations Decca et Eureka-Rebecca étant supprimées. Sur tous les appareils, l’issue de secours du poste de pilotage, qui intéressait le plafond de la cabine, sur le côté gauche, a été récemment abaissée et elle inscrit, dans sa partie largable, la vitre latérale de poste. Enfin, sur tous les appareils, le train principal est devenu symétrique et, sur les derniers, la roue avant comprend une trappe bouclier et deux trappes latérales qui se referment lorsque le train est sorti et permettent le vol dans cette configuration. Soulignons encore que la petite arête dorsale, précédant les dérives sur les prototypes, a été conservée jusqu’au 80ème avion, puis remplacée par une arête droite et plus longue. Quant à la voilure, elle fut renforcée du 2ème au 25ème appareil pour permettre un poids au décollage de 19 600 kilos. Â partir du 26ème avion, une nouvelle voilure autorisa des poids maxime de 21 700 kg en version militaire et 20 600 kg en version civile.


...et même aériens. Ici, un hélicoptère « Alouette » à destination du Groenland

Nord 2502 civil

    LES N-2502 civils furent précédés d’un prototype militaire. Ce nouvel avion résultait surtout du montage de réacteurs Turboméca « Marboré » II en bouts d’aile. Dans ce but, la voilure fut renforcée localement, la nervure de rive, notamment, devant comprendre les arcs de fixation des réacteurs. L’appareil fut suivi de la version civile utilisée par les compagnies UAT et Air Algérie. Dans cette version, la partie arrière du fuselage a été revue, les portes latérales étant supprimées et remplacées par une porte unique, axiale, percée dans le fond des vantaux qu’il n’est plus nécessaire d’ouvrir pour que les passagers accèdent à la soute qui est devenue une cabine. Le N-2502 civil fut essayé à 22 tonnes le 1er juin 1955 et à 23 tonnes le 24 mars 1958. Bien entendu, la soute a subi des améliorations, compte tenu de sa nouvelle utilisation. Les parois ont reçu une garniture d’insonorisation, les hublots sont à double paroi, un revêtement protecteur recouvre le plancher et une cloison amovible, montée à l’avant, permet d’augmenter ou de diminuer, à volonté, le volume consacré au fret.
Les N-2502 de l’UAT sont basés à Douala et touchent neuf escales au Cameroun et d’autres au Gabon, Moyen-Congo, Tchad et Oubangui-Charri. Le premier avion commandé fut mis en service le 10 septembre 1954. Le 3 mai 1956, les deux premiers appareils exploités totalisaient 3 900 heures de vol. En janvier 1957, les quatre appareils utilisés affichaient respectivement 3 100, 2 700, 1 500 et 1 100 heures de vol et totalisaient 12 300 heures en septembre de la même année. En janvier 1958, les six appareils en sont à 15 700 heures, l’avion de pointe en ayant, pour sa part, 5 000 à lui tout seul ! Le 7 mars 1958, l’UAT met en service son septième « Noratlas » et, le 21 août dernier, les sept avions totalisaient 70 000 passagers, 21 340 tonnes, 21 300 heures de vol et bien plus de six millions de kilomètres parcourus. Et cela continue...
De son côté, Air Algérie reçut son premier avion et le mit en service le 8 septembre 1957. Un autre appareil suivait bientôt et, en janvier 1958, les deux « Noratlas » totalisaient 1 200 heures de vol et 500 atterrissages. Là aussi, cela continue...

 

Le « Noratlas » de la Marine

    APRÈS avoir renoncé, comme nous l’avons vu, au N-2505 anti-sous-marin, la Marine nationale accorda plus d’intérêt au type 2504 qui est une version d’école ASM du 2502 civil. Comme ce dernier, il possède deux réacteurs en bouts d’aile et s’apparente fortement à son grand frère africain. Mais sa soute recèle une installation particulièrement complexe, radio, radar et électronique. Véritable classe volante, le N-2504 était prévu sur le budget 1957 (quatre avions), puis une vingtaine d’exemplaires devaient être commandés au titre du budget 1958. Mais les crédits furent amputés et le premier N-2504 vient tout juste d’effectuer son premier vol, à Melun-Villaroche, le 17 novembre 1958, sans que l’on puisse affirmer s’il connaîtra une suite prochaine.


Pour dépanner un avion au Sahara, ce « Noratlas » emporte une pointe avant.

 

Le Nord 2506 d’assaut

    DISPOSANT d’une puissance lui autorisant, à bon poids total, des décollages courts, le « Noratlas » fut envisagé comme un avion de transport d’assaut. Cette mission consiste à aller déposer, à proximité de la ligne de feu, des charges militaires, renforts en hommes ou matériel roulant, munitions, etc., et de quitter cette zone dangereuse avant que d’éventuels mortiers ennemis aient eu le temps de régler leur tir... Cela suppose un atterrissage rapide sur de petits terrains, un déchargement accéléré pendant que les hélices tournent toujours et un départ quasi-immédiat. Des essais eurent lieu tout d’abord avec le 40ème avion N-2501 de série que l’on modifia dans ce sens. De nouveaux volets furent montés, ainsi que des aérofreins qui furent d’ailleurs vite abandonnés. On tenta de freiner l’avion à l’atterrissage en utilisant, dans l’approche, les hélices à un pas très petit. Des essais étaient en cours à Melun-Villaroche quand la catastrophe survint. On ne sut jamais avec exactitude ni certitude ce qui était arrivé, on supposa que les propulseurs étaient passés, en vol, au pas réversible. On ressentit, surtout à la SNCAN et dans toute notre aviation, une immense douleur, ce 26 avril 1957. Un équipage d’élite disparaissait dans l’accident. Michel Chalard, recordman de vitesse ascensionnelle avec le « Gerfaut » depuis le 28 février 1958, Marcel Perrin, ancien de « Normandie-Niemen », huit années au CEV, tous deux pilotes d’essais, Jean Coupet, attaché à la DTI, Louis Pruneau, directeur-adjoint des essais en vol de la SNCAN et Jean Duchemin, mécanicien navigant, tous périssaient au cours d’un vol d’essai demandé. Bien que l’on ne put incriminer avec certitude absolue les hélices, on s’était vite aperçu, et les faits devaient, hélas ! le confirmer, que le système, pour efficace qu’il soit, ne pouvait l’être qu’entre les mains d’équipages supérieurement doués et que la part de risque était trop grande. On en revint à des solutions plus traditionnelles. C’est ainsi que naquit le Nord 2506, issu du malheureux Nord 2501 E (expérimental). Une expérimentation complète fut entreprise avec l’avion en Afrique du Nord, le N-2506 utilisant parfois des terrains de 500 mètres seulement et à des altitudes élevées. L’appareil, qui avait effectué son premier vol le 9 août 1956, devait être le premier d’une présérie, mais les crédits manquants ne permirent pas de mener cette affaire à bien, du moins jusqu’à l’heure actuelle. Le N-2506 présente une structure renforcée d’une façon presque générale. Les nouveaux volets sont à double fente, capables, de ce fait, d’un braquage plus important. Leur surface a été augmentée en faisant déborder légèrement leur bord de fuite. Leur efficacité nous fut démontrée par Jean Lanvario, lors d’une présentation à Pau et au cours de laquelle il nous gratifia d’une descente sous un angle alarmant, stoppée sur la piste... Pour la partie délicate de la mission, rapidité de déchargement, le N-2506 est doté de deux ensembles spéciaux. D’une part, le train Messier qui, par rapport au train standard, a été renforcé de 50 % et comprend une possibilité d’affaissement par vidage des amortisseurs. Comme le train avant, qui est devenu un diabolo, reste ce qu’il est, l’arrière de la soute vient se placer à 50 cm à peine du sol, cependant que la pente donnée au plancher facilite le déchargement, pour peu que l’on ait disposé des rouleaux. Dans cette opération, l’avion peut encore avancer, tout comme une benne basculante... Les roues de l’atterrisseur sont à pneus à basse pression (2,7 kg/cm² au lieu de 3,5). D’autre part, les portes arrière de soute sont nouvelles. Leur partie inférieure constitue une rampe de déchargement et tout l’ensemble est commandé hydrauliquement depuis le poste de pilotage. On étudie actuellement une ouverture des portes par vérin unique commandant également l’abaissement des rampes. Voyons comment se passe une mission de transport d’assaut. L’avion se présente et, grâce aux volets, descend très rapidement, puis atterrit. Dès ce moment, le pilote affaisse son train et commande l’ouverture des portes arrière. Ce faisant, les deux vantaux latéraux s’ouvrent et les rampes s’abaissent. Toute la charge est débarquée et, au besoin, les moteurs tournant toujours, l’avion peut avancer un peu pour dégager son arrière. Sitôt ce dégagement obtenu, le pilote referme ses portes, regonfle ses amortisseurs et décolle immédiatement. Repartant à vide, il atteindra les 15 m en moins de 500 mètres...


..
Fuseau - réacteur, première formule... et fuseau définitivement retenu.

Comme chez les militaires, le N-2502 transporte des automobiles, du fret...

… et de nombreux passagers « touriste »


Le premier Nord 2502, muni de deux réacteurs en bouts d’aile était militaire...

...mais ses applications principales sont civiles, grâce à l’UAT et Air Algérie.


Le Nord 2507 de sauvetage

    PENSANT au remplacement des « Languedoc » du SAMAR, le secrétariat général à l’aviation civile et commerciale a demandé à la SNCAN de définir une version de sauvetage en mer et sur terre de son cargo. Les techniciens partirent de la cellule du N-2504, lequel dérive lui-même du N-2502, et proposa un appareil nouveau, le Nord 2507. Celui-ci doit avoir un équipage de cinq hommes, comme le N-2501, et sa soute est prévue pour accueillir cinq veilleurs, un radariste et un mécanicien de soute, cependant qu’un carré est aménagé pour six hommes, soit un équipage au repos. Quelques hublots seront remplacés par des bulbes transparents à l’intention des veilleurs-observateurs. Tous ces hommes sont destinés, selon le cas maximum, à rester en l’air une douzaine d’heures... Bien entendu, les crédits insuffisants n’ont pas encore permis de réaliser cette machine dont le besoin se fera, pourtant, bientôt sentir...


Maquette d’aménagement en classe volante du N-2504.

Du N-2503 au N-2508

    AINSI qu’on l’a vu, en montant des moteurs Pratt and Whitney R.-2800 CB17 en lieu et place des SNECMA « Hercules », on a fait du N-2501 un N-2503. Cet avion totalisait, au 25 mai 1956, 35 heures de vol, tant chez le constructeur qu’au CEV. On sait encore que les performances n’étaient pas des plus enthousiasmantes et on résolut de monter deux réacteurs « Marboré » II de 400 kgp en bouts d’aile. On obtint, du coup, un tout autre avion, lequel prit la désignation Nord 2508 et dont le premier vol eut lieu le 27 mai 1957. Plus puissant que tous les autres « Noratlas », il n’obtint, cependant son CDN qu’au poids de 23 tonnes en raison de ses limitations de structure. Ses performances sont, bien entendu, supérieures à celles du CDN à 23 tonnes — sa vitesse de décollage VI étant égale à sa vitesse de sécurité V2 à laquelle on peut rentrer le train et poursuivre l’envol si un des deux moteurs s’arrête ! — et la présence des compresseurs à deux étages des moteurs CB17 rendent l’avion très intéressant sur des terrains élevés. Rien d’étonnant, alors, que cet appareil ait retenu l’attention des experts hindous, dès août 1957. Â la suite d’une étude des possibilités mondiales, le N-2503 fut admis comme le seul avion capable d’enlever de fortes charges à partir d’aérodromes situés en montagne, à 4 000 mètres d’altitude. Il en administra d’ailleurs la preuve lors d’une tournée de deux mois en Inde où. à la demande de la compagnie Kalinga Airlines, il totalisa 160 heures de vol et 200 atterrissages, du 15 novembre 1957 au 10 janvier 1958. Nous reviendrons plus tard sur cette véritable « Odyssée du 2508 », mais signalons tout .de même quelques cas particuliers. Les missions allèrent de la démonstration, un peu partout et à la demande de la compagnie comme de l’armée de terre et celle de l’air indiennes..., aux parachutages et « droppings » sur des régions isolées, à la formation d’équipages nationaux, etc. Un vol remarquable fut effectué au poids de 20 500 kilos entre l’aérodrome de Srinagar, dans le Cachemire et celui de Leh, situé à 3 500 mètres d’altitude, quoiqu’au fond de la vallée de l’Indus partout bordée de sommets culminants à 6 000 mètres. L’avion franchit aisément la chaîne de l’Himalaya avant de se poser à Leh et répéta plusieurs fois cette manœuvre en arrêtant volontairement un moteur, en remettant en route les réacteurs en altitude, en décollant avec arrêt d’un moteur au moment critique, en atterrissant court dans le sens de la pente descendante... En d’autres cas, il effectua un décollage avec arrêt au cours de l’envol, non seulement du moteur, mais aussi du réacteur d’un même côté. Les autorisations chinoises de se poser à Lhassa, dans le Thibet, n’ayant pas encore été accordées, l’ouverture de la ligne Calcutta-Lhassa n’a pu avoir lieu. Sinon, le Nord 2508 aurait été commandé aussitôt. Cela n’est, sans doute, que partie remise... Ajoutons, en conclusion, que l’équipage du N-2508 était composé de MM. Lanvario, pilote ; Caillard, ingénieur et second pilote ; Malleau, radionavigateur et Boutes, mécanicien.
Que tous soient remerciés chaudement de nous avoir facilité la tâche à ce point !
M. Puisségur, entré chez Potez en 1929, et qui est en contact permanent avec l’ancienne usine Potez de Méaulte, nous apprit que la surface couverte des installations de Bourges atteignait actuellement 65 434 m². Ce chiffre ne comprend pas la nouvelle usine destinée spécialement à la construction d’engins spéciaux, usine ultra-moderne, conditionnée, dépoussiérée, etc.… sur laquelle nous reviendrons ultérieurement. Les effectifs actuels comptent 1 850 personnes incluant les 175 qui travaillent à l’usine de Châteaudun qui répare et révise les « Noratlas » en service. Bourges est consacrée à la production des N-2501 militaires et autres versions civiles. L’usine construit entièrement le fuselage, en assure l’équipement et l’aménagement complets, reçoit les autres éléments et les assemble, procède à la mise en ordre de vol et aux essais de mise au point, avant la livraison. Bourges groupe encore les rechanges et fabrique les équipements secondaires. De plus, l’usine produit des voilures de chasseurs Dassault SMB-2 et se prépare à construire, en participation, les ailes du « Mirage » III C de série. À cet effet, une machine à fraiser les panneaux de revêtement est attendue sous peu.
Dans la production des « Noratlas », le plan central et les groupes motopropulseurs sont construits et assemblés à l’usine des Mureaux, cependant que les demi-ailes externes sont le fait de l’usine Breguet d’Anglet, cette fabrication devant être reprise incessamment par Bourges dont la charge de travail est actuellement faible en raison des étalements de commandes. Enfin, les poutres et les empennages viennent de Méaulte où l’ancienne usine Potez est en train de devenir l’usine-pilote pour la production prochaine des ailes des « Mirage » III C.
Dans le domaine mécanique, l’immense hall aux machines-outils, d’une moyenne d’âge très basse, est déjà absorbé en partie par la fabrication d’engins spéciaux. Celle-ci emploie actuellement 200 ouvriers environ et ce chiffre ne fera qu’augmenter à mesure que les mois s’écouleront... Cela contribuera à rendre moins sensible la diminution de la cadence de sortie des « Noratlas », cadence qui était de cinq avions mensuels et a été ramenée à deux exemplaires par mois. Et pourtant, l’usine de Bourges pourrait absorber une charge de travail importante, pour laquelle elle a été établie. Avec le « Noratlas », étudié à Châtillon, cela avait pourtant bien commencé par un travail de début de série avec les liasses de dessins « prototype », puis l’élan avait été tel que, lors de la sortie du 34ème avion, le général Fay, lui-même, avait tenu à féliciter les gens de Bourges pour l’excellente tenue des délais. Il est vraiment dommage de voir un tel potentiel non utilisé à plein. Au cours d’une visite très complète et très instructive, nous avons pu voir les installations de production et de contrôle et nous rendre compte qu’elles travaillaient loin de leurs possibilités. Encore, devons-nous, peut-être, nous réjouir que l’usine ne soit pas fermée, tout simplement ?

 

VISITE À L’USINE DE BOURGES

L’ACCUEIL à Châtillon-sous-Bagneux avait été des plus sympathiques. Tout d’abord, les relations extérieures, M. de Lapeyrouse et Mme Auffret en tête, nous avaient abandonné quelque documentation, puis les portes s’étaient ouvertes et le père de l’avion, l’ingénieur en chef Calvy et son adjoint, M Brissonnet nous avaient accordé beaucoup de leur temps. L’un parlait et l’autre offrait une documentation technique dont le prix égale celui de deux avions... Puis on nous dit : « Il faut aller à Bourges ! »
Nous allâmes à Bourges et en revînmes enchantés et confus à la fois tant l’accueil avait été chaleureux et franc... Si M. Puisségur, directeur de l’usine ne put nous recevoir que le lendemain, nous fûmes littéralement happés dès notre arrivée par M. Trijeau. directeur-adjoint, lequel ne nous laissa que pour nous confier aux mains d’hommes tels que M. Lefèbvre, chef de la production, ou M. Huret, chef du contrôle.


Mise au point


Vantaux et rampes intégrés du N-2506


Nouveau diabolo avant du même avion...


...que l’on voit en vol, réacteurs stoppés et dont les entrées d’air sont masquées.

    LORS de notre passage à Bourges, c’est le Nord 2501, n° 171, qui était en cours de mise au point, ce qu’on appelait auparavant la réception. Comment se passe cette mise au point ? Lorsque le 171 fut terminé en usine, il passa, comme tous les autres, entre les mains des équipes de M. Huret — dit le Barbu — grand chef du contrôle. Si beaucoup de compagnons ont bien travaillé pour parvenir à l’avion fini, beaucoup de contrôleurs ont vérifié et revérifié la qualité du travail, ne laissant place à aucune faiblesse. Chaque opération, même mineure intervenant dans la fabrication puis l’assemblage de l’avion, a été minutieusement contrôlée et, une fois l’avion terminé, c’est encore à M. Huret et ses hommes de décider de la suite des opérations. Chacun des contrôleurs assermentés revoit encore la partie de l’avion faisant objet de sa spécialité et veille aux dernières opérations de travail. Il y en a près d’une quarantaine, allant du rinçage des réservoirs d’huile des relais, d’accessoires, du réglage et des vérifications des circuits et commandes jusqu’au déstockage des réservoirs d’essence et aux essais de trains, de volets et de multiples équipements, et se terminant par un premier centrage de l’appareil. Si tout cela s’est fait sans heurts, l’avion est remis à la piste.
L’équipe de piste effectue alors la pesée de l’avion, détermine son centrage et communique tout cela à l’équipe PN, l’équipage, qui en accepte ou discute les données. Ensuite, les moteurs sont essayés au point fixe et la piste vérifie les pompes à essence, à huile, les consommations, les ensembles hydrauliques, etc. L’avion étant mis sur vérins, on procède à de nouveaux essais de train en utilisant les circuits normal et de secours. Dans chaque cas, si une retouche est nécessaire, elle est entreprise avant de passer au stade suivant. Tout ceci étant mené à bien, l’avion est enfin mis à la disposition de l’équipage.
Les équipages de la SNCAN dépendent directement de M. Mangeot qui, à Melun-Villaroche, dirige les activités du personnel navigant de toute la société, dans toutes les usines et sur tous les terrains. C’est ainsi que le pilote Armand Jacquet, qui vole sur le « Griffon » et assiste André Turcat à Istres, avait effectué la mise au point du « Noratlas », n° 170, à Bourges. Turcat, de son côté, a décollé le petit Nord 3400 à Melun-Villaroche, entre deux vols supersoniques, etc. Pour le 171, l’équipage était commandé par Jean Lanvario, un athlète sympathique au possible dont il faudra bien raconter la vie un jour. Il n’était pas possible de trouver un chef-pilote aussi sympathique, puisqu’il nous laissa partager une journée de son équipage en pleine mise au point. Cette journée, presque de routine pour ces « barons », fut, pour nous, une journée ardente ! Lanvario nous expliqua tout d’abord que la première chose était les « briefings » permettant de bien s’entendre avec l’équipage. Lui, Lanvario, pilote la machine, s’occupe des instruments de bord, de la planche-pilote, de la radio VHF et s’intéresse aux qualités de vol comme au bon fonctionnement général. Mais revenons à notre avion 171.M. Huret, un « Barbu » qui est aussi un sacré « moustachu » (en langage aéronautique, un type énorme), a finalement libéré l’appareil. C’est, alors, le point fixe équipage et le premier contrôle général du PN. Si tout va bien, on mène l’avion sur la piste de régulation des compas (gyrosyn, radiocompas, compas de secours). Cette opération terminée, on attaque les essais de rouleur et on tâte les freins, en alimentation normale et en secours. Des retouches sont nécessaires ? On les fait, puis on recommence. Enfin, on s’adresse à la météo et c’est bientôt le premier vol de mise au point. Celui-ci durera près de deux heures au cours desquelles le pilote effectuera une montée, les décrochages, des paliers, branchera le pilote automatique, effectuera une survitesse, passera chaque hélice au grand pas automatique (mise en drapeau), essaiera les circuits de secours. Pendant ce temps, son équipage, chacun dans sa spécialité, couvrira des feuilles de chiffres et de notes d’observations. À l’atterrissage, chaque navigant deviendra un employé de bureau et consignera ses chiffres et observations sur des états qu’il signera ensuite. Si des retouches sont nécessaires, une fiche de travaux sera émise, puis reviendra au PN avec les visas de la fabrication, des contrôles, etc. Les essais pourront reprendre. Le vol n° 2 sera alors un vol de nuit et le troisième consistera, en trois heures, à essayer l’installation ILS au cours de percées sur Lyon, Orly, etc., à vérifier le synthétiseur Chombard, le système de navigation Decca, les dégivreurs, le pilote automatique, le compas de secours. Si tout ne donne pas satisfaction, on refera un vol après retouche...
Ce jour-là, à Bourges, Lanvario et ses hommes attendaient que l’on ait trouvé l’origine d’un ennui du côté des génératrices. Delacour, le chef radio de l’usine arriva et annonça qu’il avait trouvé. Une histoire de résistance sur la ligne. Discute de coup entre Delacour et l’équipage. II n’y a qu’à aller voir cela en l’air. Le vol est décidé. Les cinq hommes présents s’apprêtent. Daniel Mandret, expérimentateur navigant sera chargé de sonder tous les équipements de l’avion. Aujourd’hui, vol de contrôle, il ne fera pas tout, évidemment... Claude Jossin, ingénieur d’essai navigant, complétera l’action du premier. Tous deux ont assuré la mise en route de la série des « Noratlas » et commencent à connaître la question. Le radio Jacques Canel aura du travail aujourd’hui. Sa tâche normale est la réception du matériel radio au fur et à mesure des modifications intervenant ou des nouveaux types d’appareils montés sur avion. Aussi averti en radio, qu’en radionavigation et en électronique, il est là aussi depuis le début de la série. Tout comme Marcel Blanchard, d’ailleurs, mécanicien, responsable de toute la mécanique : moteurs, opérations secours, circuits hydrauliques, train, volets, etc. Tout comme François Hermitte, également mécanicien-navigant, tout comme Jean Boutes, troisième mécanicien.


À Bourges, la chaîne de montage est encore aussi encombrée, mais moins active.


M. Puisségur, directeur de l’usine...


...et son adjoint direct, M. Trijeau.


De g. à d., MM. Mandret, expérimentateur-navigant, Jossin, ingénieur d’essais en vol. Canel, radionavigant, Blanchard, mécanicien-navigant et Lanvario, pilote.


Train affaissé du N-2506 expérimental.


Le Nord 2508 effectua, de remarquables vols dans les régions de l’Himalaya.

Noratlas033 Les caractéristiques du Nord 2508 : moteurs Pratt and Whitney et turboréacteurs.

    Puis on gagna l’avion 171. Lanvario prit sa place à gauche, Jossin s’installa à sa droite. Entre les deux et un peu en retrait, Hermitte, assis sur le tabouret du mécano, développa la check-list, ouvrit quelque chose, ferma autre chose, bref effectua des gestes sûrs qui commencèrent à donner la vie à l’avion. Les écouteurs à l’oreille, chacun s’affairait. Quelques bribes de phrases, pas toutes compréhensibles aux néophytes que nous étions grésillaient sous notre casque. Canel s’apprêtait à se colleter avec ses génératrices, Mandret, lui, était derrière ; il avait cédé sa place au noircisseur de papier... L’avion frémit, les moteurs étaient lancés. Roulement, décollage et aussitôt une intense conversation s’installa. Lanvario basculait son avion, de temps en temps, pour ne pas perdre le terrain par ce soir de brume. Canel était le plus bavard et Jossin, se tournant pour lire les voltmètres et autres cadrans, lui répondait. Des réflexions ou commentaires, encore des chiffres, pendant que l’avion volait dans le calme. Une phrase complète nous parvint enfin : « Hé ! » les barons, c’est bientôt fini ? Avord est bouché... ça commence ici... ». Encore quelques chiffres, et Jossin et Canel libérèrent Lanvario. Tour de piste, atterrissage sur des œufs, sur de l’ouate, presque dans l’ouate...
    Canel et Jossin étaient contents, les géné marchaient. Le vol avait duré une demi-heure ; il fallut une heure pour discuter et coucher sur le papier les résultats et les observations. Tout le monde était redevenu sage. La mise au point du 171 avançait bien. Il serait bientôt remis à l’équipage du CEV. Celui-ci devait assurer la recette de l’avion, ce qui s’appelait avant la contre-réception client. Les vols de mise au point terminés, un rapport global groupant les observations, retouches, vérifications, relatives à ces vols successifs est remis à l’équipage CEV qui l’étudie. La série étant bien lancée, l’avion étant bien connu et les hommes de Bourges jouissant d’une excellente réputation, la recette ne fait pas toujours obligatoirement l’objet de vols de contrôle. Le « Noratlas » 170 venait d’être accepté sur simple lecture du rapport lorsque nous arrivâmes à Bourges.

    Tout ceci étant terminé, tout le monde étant d’accord, tous les papiers étant signés, l’avion est enfin remis à l’armée de l’Air. Il commence sa vraie carrière...


Très curieuse vue de la structure et de l’équipement d’une des deux poutres.

DESCRIPTION

    LE Nord-Aviation 2502 « Noratlas » est un monoplan de transport, bimoteur, bipoutre à empennages bi dérives et train d’atterrissage tricycle escamotable. Sa conception repose sur la séparation des fonctions aérodynamiques et de propulsion, et celles d’utilisation. Dans cet esprit, l’avion doit être considéré selon deux grands ensembles. D’une part le planeur groupant la voilure, les moteurs, la partie principale de l’atterrisseur, les poutres et les empennages, et, d’autre part, le fuselage qui ne participe en aucune manière aux efforts de vol et peut, de ce fait, subir toutes les modifications de formes dans la mesure où elles n’altèrent pas les performances ou les qualités de vol. Ce fuselage peut aussi être aménagé en fonction des missions envisagées, sans qu’il en résulte, à égalité de poids, le moindre changement aérodynamique et, par conséquent, la moindre altération des performances.

La voilure

    La voilure monoplane du N-2501 s’étend sur une envergure de 33,60 m et offre une forme en plan parfaitement trapézoïdale, avec bouts francs. La surface totale est de 101,20 m². Vue de face, l’aile affecte un dièdre faible puisqu’il atteint, exactement, 1° 19’ 30”. Elle peut être scindée en trois éléments ; un plan central d’une envergure de 8 m et d’une profondeur constante de 3,80 m et deux demi-ailes externes d’une envergure de 12,30 m chacune et dont la profondeur passe de 3,80 m à la racine à 1,90 m en bouts. Le profil choisi est de la famille NACA 23.000 dont l’épaisseur relative est de 18 % sur tout le plan central et évolue ensuite vers 12 % jusqu’aux extrémités. Le calage de 3° sur la référence fuselage est constant sur toute l’envergure. Le bord de fuite est entièrement partagé entre les volets et les ailerons. Les premiers sont tronçonnés en trois éléments. L’élément situé entre le fuselage et les poutres a une envergure de 1,35 m et les deux autres, respectivement, de 2,49 m et 2,40 m. Tous peuvent prendre les positions de braquage compris entre 0 et 50°. Quant aux ailerons, également tronçonnés en trois éléments, ils occupent, de chaque côté, 6,62 m du bord de fuite. On trouve des tabs sur les deux éléments internes des gouvernes de gauchissement, l’un de ces tabs étant commandé.

 


Sur les N-2502, la porte passagers est inscrite dans les vantaux ici ouverts.

    La structure de l’aile repose sur un caisson principal dont les âmes avant et arrière sont respectivement situées à, 17 % et à 63 %. Ces âmes en I de tôle pleine raidie verticalement sont reliées par des nervures en tôle assez espacées. Entre ces nervures, on trouve des éléments en treillis laissant la place aux outres souples qui présentent une capacité totale de 5 100 litres. Cette ossature est recouverte de panneaux de revêtement d’épaisseur décroissante en envergure et qui sont eux-mêmes raidis par des lisses en U dont la section est également décroissante dans le même sens. Les dessins de Pérard renseigneront plus le lecteur que n’importe quel texte sur la façon dont les demi-ailes sont raccordées au plan central et dont celui-ci est fixé au fuselage...
Les moteurs sont des SNECMA « Hercules » 758 munis de démarreurs à dispositifs d’enclenchement et de débrayage automatiques. Chaque moteur donne 2 068 ch au décollage jusqu’à 915 m, 1 700 ch en maximum continu jusqu’à 1 525 m et 1 220 ch en croisière maximum à 3 275 m. L’alimentation des carburateurs est assurée par des entrées d’air ménagées dans le bord d’attaque de l’aile, à l’extérieur des nacelles-moteurs. Deux relais d’accessoires entraînés par des arbres télescopiques entraînent à leur tour, chacun, un compresseur d’air, deux pompes à vide, une pompe hydraulique, une génératrice de 6 000 W, ainsi que la génératrice de tachyrnètre de chaque moteur. Les réacteurs Turboméca « Marboré » II de 400 kgp chacun sont montés sur la nervure de rive de chaque demi-aile, nervure qui a été soigneusement renforcée à cet effet. Puisant leur combustible dans les réservoirs extérieurs de voilure, ils tournent à 22 600 t/min au décollage et leur durée maximum de fonctionnement à ce régime est fixée à 15 m.

 

Le pilote automatique SFENA du Nord 2508
UN pilote automatique 3 axes SFENA vient d’être essayé et défini.
Sa composition est la suivante :
1. DÉTECTION références angulaires et de vitesses angulaires par une centrale de verticale et deux gyromètres.
2. AMPLIFICATION par relais et amplificateurs magnétiques.
3. COMMANDE DIRECTE DES GOUVERNES par 3 servomoteurs électriques, qui donnent leurs preuves d’endurance depuis plusieurs années.
Le pilote automatique assumera aussi :
Le vol à altitude constante et à cap constant ; les virages coordonnés à toutes vitesses angulaires ; les montées et descentes à assiette constante ; les procédures d’atterrissage et de décollage automatiques par l’intermédiaire d’un appareil synthétiseur ; la commande automatique du tab de profondeur.

 

Le fuselage

    LE fuselage présente une longueur de 15,61 m pour une largeur maximum de 3,10 m et une hauteur de 3,20 m extérieurement. Soulignons que le chargement de ce fuselage peut se faire avec les limites normales de centrage oscillant entre 18 et 27 %. Alors que le type militaire N-2501 emploie un équipage de cinq hommes, trois hommes sont simplement nécessaires pour la mise en œuvre et la conduite du N-2502. Le fuselage peut être, généralement aménagé selon trois variantes principales. En cargo pur, la soute offre une longueur de 9,90 m, ce chiffre étant de 11,50 m si l’on va jusqu’au fond des vantaux ouvrables arrière. La largeur atteint un chiffre maximum de 2,75 m, réduite à 2,20 m au plancher lequel présente une surface totale de 21,70 m² et une résistance de 800 kg par m². Ce plancher dispose de nombreux points d’arrimage : neuf de 3 tonnes, dix-huit de 2 tonnes et vingt-deux d’une tonne. Les charges peuvent être admises, depuis les rampes de chargement, par un treuil « Tirfor » amenant un câble de traction jusqu’au fond de la soute. Celle-ci offre un volume disponible de 51 m3 avec une hauteur variant de 2 m à 2,40 m. L’accès de cette soute est permis par des portes latérales arrière de 0,70 x 1,60 m et, surtout, par les vantaux de poupe qui, en s’ouvrant latéralement, démasquent pratiquement tout le gabarit de la soute en offrant une ouverture de 2,60 m x 2,10 m. Quant à l’équipage, il accède à son poste en empruntant la porte avant standard, percée à gauche et de 0,75 m de largeur pour 1,25 de haut.
L’aménagement pour passagers comporte plusieurs variantes. La plus courante est la suivante : un compartiment avant est réservé aux bagages et au fret de faible encombrement. Ce compartiment est divisé en deux soutes droite et gauche, toutes deux de 1,42 m de profondeur et 2 m de hauteur et d’un volume de 2,75 m3 à droite et 1,60 m3 à gauche. La travée suivante est la cabine des passagers, d’une longueur de 8,40 m pour une largeur maximum de 2,75 m et 2,20 au plancher et une hauteur constante de 2 m. Cette cabine comprend neuf rangées de cinq sièges répartis transversalement à raison de deux sièges à droite et trois à gauche du couloir central. Une variante reçoit huit rangs seulement, soit 40 passagers au lieu de 45. Les sièges sont légèrement décalés en profondeur. Dans deux autres aménagements, la cabine peut recevoir, plus confortablement, 32 ou 36 passagers assis à raison de deux de chaque côté du couloir. Dans tous les cas, les passagers disposent d’aérateurs individuels qui viennent doubler le conditionnement de cabine. Notons encore que les hublots sont à double paroi et qu’ils sont intégrés dans autant d’issues de secours. Enfin, le compartiment arrière, juste avant les vantaux, contient à droite un vestiaire et, à gauche, un lavabo. L’accès de la cabine a lieu par une porte arrière ménagée dans les vantaux eux-mêmes. Une version mixte cargo-passagers permet d’augmenter le volume disponible pour le fret, à l’avant, et de diminuer le nombre de places assises, ou inversement, par le simple jeu d’une cloison amovible en profondeur. Cette cloison légère comporte une ossature métallique habillée par des panneaux de toile.
La structure du fuselage est absolument classique et comprend une série de lisses longitudinales réunies par des cadres, lesquels comportent, à leur partie inférieure, des renforcements en forme de quille. Le fuselage est construit, en section, en quatre éléments qui sont ensuite assemblés : deux éléments latéraux, un plancher et un toit.

 


Nouvelle disposition des trappes de train avant montées sur les Nord 2501.

Les empennages

    LES empennages sont portés par deux poutres venant prendre appui en bout du plan central de voilure. Ces poutres reçoivent les moteurs à l’avant puis le train d’atterrissage principal, tandis qu’elles transmettent les efforts des empennages. Au- delà de la voilure, elles sont constituées de cadres circulaires, de lisses et d’une peau de revêtement. Elles sont espacées l’une de l’autre de 7,50 m. Le stabilisateur horizontal relie les deux poutres à l’arrière. Son envergure est donc égale à l’espacement de ces dernières. La profondeur, constante, est de 2,40 m, la surface totale atteignant 16,50 m² efficaces. Le plan fixe est calé à — 1° 30’ sur la référence fuselage. La gouverne de profondeur occupe 1,15 m de la profondeur générale. Elle est tronçonnée en trois éléments dont l’élément central est muni d’un tab de compensation de régime commandé depuis le poste de pilotage (trim tab).
Chaque empennage vertical présente une hauteur de 2,685 m au-dessus de l’axe de la poutre correspondante, et sa surface inférieure dépasse de 1 m en dessous de cet axe. Au sol, la partie basse des dérives est à 3,25 m lorsque l’avion est à son poids maximum. La surface totale des empennages verticaux est de 12,10 m².
La structure des empennages est la même pour le stabilisateur et pour les dérives. Elle repose sur un caisson bi longeron dont les deux âmes sont réunies par des nervures traitées en pont de tôle emboutie. Somme toute, on n’a fait que reprendre, en plus « léger », le principe de construction de la voilure principale.

 

..
À gauche, appui de cric et vérin de levage de l’avion en entretien normal.
À droite, vue du même atterrisseur montrant son autre extrémité et le système simple d’escamotage.

 

CARACTERISTIQUES. — Envergure : 33,60 m. Longueur : 21,96 m. Hauteur : 6,06 m. Surface alaire : 101,20 m². Poids à vide équipé : 13 645 kg. Charge marchande maximum : 7 550 kg. (cargo), 6 560 kg. (mixte). Poids total maximum : 23 000 kg. Charge alaire : 227,30 kg.-m².
PUISSANCE. — Deux moteurs SNECMA « Hercules » 758-759 de 2 068 ch. au décollage et deux réacteurs Turboméca « Marboré » II de 400 kgp.
PERFORMANCES. — Vitesse maximum à 1 525 m. (moteurs et réacteurs) : 431 km/h. Vitesse de croisière (moteurs seuls) à 3 000 m. : 315 km/h. avec 950 ch. par moteur et 300 km/h. avec 900 ch. Passage des 15 m. au décollage : 1 100 m. Longueur accélération-arrêt : 1.600 m. Atterrissage après les 15 m. : 900 m. sans « reverse ».Vitesse ascensionnelle initiale : 6,25 msec. Sur un moteur et deux réacteurs : 1,75 msec. Plafond pratique ;6.300 m. Autonomies sans réserves et par vent nul : 1 270 km. avec 7 550 kg. de charge ; 2 750 km. avec 5 765 kg. Autonomie maximum : 4 000 km.

 

Le train d’atterrissage

    Réalisé par Messier, le train d’atterrissage présente une voie de 7,76 m pour un empattement de 6,30 m. L’avion étant à vide, l’angle de garde arrière est de 13°. Ce train tricycle autorise un rayon de virage minimum qui est de 21,14 m mesuré en bouts d’aile et de 8,22 m mesuré au train principal. Ce dernier s’escamote dans l’axe et vers l’arrière. Étant donnée sa grande hauteur, l’aile étant haute, le relevage comprend une brisée de la jambe principale vers l’avant rejetant la roue beaucoup moins en arrière. Le logement est ensuite obturé par deux panneaux latéraux laissant dépasser une faible partie du pneu. Celui-ci est de dimensions 1440 x 500 et est gonflé à une pression basse de 3,5 kg/cm². La roue avant, portée par une fourche, est rappelée vers l’arrière et dans l’axe. Équipé d’un pneu de 950 x 335 gonflé à 3 kg/cm², elle est entièrement cachée dans son puits par deux trappes latérales de fuselage liées mécaniquement à la jambe.