Tessalit (Mali)
Drapeau de la Fédération du Mali-Sénégal 1960
À l'extrême nord de ce qui était l’Afrique Occidentale Française, au pied du massif de l'Adrar des Iforas, se trouve une petite palmeraie nommée Tessalit, la première sur la route transsaharienne (« piste impériale ») Oran-Gao après la traversée du désert du Tanezrouft.
À l'époque où les avions de transport à hélices avaient une autonomie réduite, une escale aérienne servant de ravitaillement pour les DC-3, Noratlas et autres SO-30P y avait été construite avec une piste en dur un peu à l'égard de l'oasis et du village. Une « garnison » d'une dizaine de militaires de l'Armée de l'Air y séjournaient, commandée par un adjudant et bénéficiant d'un aspirant médecin du contingent. Elle dépendait administrativement et logistiquement du « commandement français en AOF ».
C’est sur cette « base » que le CSEM avait implanté sa station radar-vents la plus au sud. La section comprenait 8 hommes avec un sous-lieutenant et un maréchal des logis professionnel dépanneur radar.
À l’époque de mes visites (1960-1961), le Mali était devenu indépendant sous la forme d'une Fédération du Mali (regroupant l'ancien Soudan français - le Mali actuel - et le Sénégal). Le divorce entre ces deux états intervint en 1961.
La région de Tessalit était peuplée de Touareg dont les nomadisations ignoraient quelque peu les frontières, dont l'importance était réduite du temps de la colonisation. Avec l'indépendance, le Mali s'efforça d'établir une organisation avec des administrateurs venus de Bamako qui se sentaient aussi étrangers que des Français dans cette région targuie. L'administrateur, un jeune de 25 ans, avait le grade de sous-préfet et occupait le bordj construit par la Légion Étrangère française.
Tessalit était, du moins à l'époque, un site de réclusion. Du bordj de l'administrateur, on pouvait apercevoir à l'extrémité de l’oasis les zeribas de ce bagne occupées par des détenus du sud, dont le costume et la couleur de peau les distinguait des Touaregs et même des harratines qui habitaient des maisons en toub dans le village.
Le poste de garde de la gendarmerie qui contrôlait la piste internationale - on ne disait plus ici impériale - était, à ma première visite, surmonté du drapeau de la Fédération Mali-Sénégal. Cette Fédération fut dissoute pendant mon séjour, compliquant un peu le ravitaillement du poste français par le sud. Ma photographie m’a valu les reproches « Mes respects mon Lieutenant, vous ne savez pas que c'est interdit de photographier les objectifs militaires ».
Le climat de Tessalit était presque aussi chaud qu'à Reggan, très agréable en hiver car l'Adrar protégeait du vent de Nord-est, beaucoup moins en été, car les montées de mousson amenaient de l’air humide à 45°C.
Nous quittâmes Tessalit le 24 mai 1961, le personnel, les chiens et la gazelle dans le C-47 tandis que le radar entreprenait sa traversée retour du Tanezrouft sur le dos d'un poids lourd affrété accompagné de deux Berliet GBO militaires pour le reste du matériel.
© 1961-2003 Jean Bellec