MISSION : ZONE
CRASH
Un papier de plus sur le Capitaine Lancaster, me direz-vous !
Sans doute, l’intérêt est tout relatif.
Pourtant ici l’objectif est d’essayer de comprendre au travers des photos et des écrits de Bill ce qui a pu se passer à partir du moment où l’avion est tombé.
De plus, les recherches dans le Tanezrouft ne sont pas finies, un morceau de l’empennage du Southern Cross Minor est toujours là-bas dans l’immensité infinie de ce désert, marquant de façon formelle le point crash. Une équipe des plus motivées repart bientôt pour récupérer cette pièce de métal et fixer définitivement le positionnement réel du point où l’avion de Bill est tombé.Dans son Log book, Bill nous dit au préalable :
« Je volais au compas… Quand quelque chose alla mal, le moteur eut des ratées et s’arrêta. Il faisait un noir d’encre. Pas de lune « environ huit heures quinze du soir », j’ai essayé de descendre doucement, mais ma terrible charge m’a entraîné et me suis retrouvé prisonnier à l’envers dans le cockpit. »
Sur la photo suivante, prise en février 1962 par la patrouille de Titus Polidori, l’on note au préalable les traces de l’avion au moment du contact avec le sol. Le Southern Cross Minor a rebondi, puis entraîné par le poids de ses réservoirs quasiment pleins il pique du nez provoquant une légère crevasse toujours visible 29 ans après le crash. Il bascule ensuite pour se retrouver couché sur le côté, sur le dos l’avant dirigé vers l’est.
Cette photo est prise en direction du sud.
La photo suivante est faite au travers du pare-brise d’un Dodge et il s’agit très certainement de la première réalisée par le photographe de l’équipe de Titus, elle est prise en direction du nord et nous montre l’appareil totalement détruit.
Cette troisième photo montre l’appareil positionné dans l’axe est ouest.
Au cours de ce carambolage après avoir pivoté sur le nez, l’appareil a fait pratiquement un « tonneau » pour se retrouver presque sur le dos. Ce pour quoi le pilote fut coincé pratiquement la tête en bas.
Les photos suivantes montrent que l’aile droite a moins souffert du choc que la gauche, en effet lors de son renversement l’avion se coucha en partie sur son aile gauche avant qu’elle ne se dégage, ceci expliquant le fait qu’elle soit mécaniquement plus endommagée.
Sur le cliché suivant il est possible de constater que l’empennage s’est littéralement enfoncé dans le reg.
Autre cliché
Cette dernière photo prise par l’équipe de Polidori, montre les recherches effectuées autour de l’épave par les militaires en veine de trouver on ne sait quoi ??
Il fallut que l’Adjudant Titus Polidori se fâche pour faire cesser ces fouilles.À l’issue de ces différents constats, la gendarmerie prendra le relais.
Voir : http://www.3emegroupedetransport.com/Chronologie.htmTout d’abord pour la récupération de la dépouille mortelle du pilote et de ses documents.
Malheureusement nous n’avons pas retrouvé jusque-là, de photos de cette première intervention des gendarmes sur les lieux de l’accident.
Puis le Commandant Aubry entouré de quelques proches, dont son ami le Commandant Mélin, arrivèrent sur le site quelques jours plus tard.
Ce fut ce groupe de gendarmes qui releva la carcasse du Southern Cross Minor, position dans laquelle la retrouva l’équipe de Wylton Dickson.
Personne ne remarqua alors qu’il manquait une partie de l’empennage qui resta, à mon sens, prisonnier du sol jusqu’en 2014 quand Mahammed l’aperçut.
L’équipe de Jean Aubry se fit prendre en photo derrière la carcasse du SCM (photo suivante).
J’irais jusqu’à penser que la photo précédente fut prise par l’équipe de Wylton Dickson en 1975.
Voir :
http://www.3emegroupedetransport.com/POWELLGraham.htm
http://3emegroupedetransport.com/Ajourneytoalegend.htm
http://3emegroupedetransport.com/LeSCMestarracheaudesert.htm
Rappel des faits :
- 1933 Bill Lancaster tombe dans le Tanezrouft (Le SCM est «pulvérisé »).
- 1962 L’épave est découverte par hasard par Titus POLIDORI.
- 1962 La dépouille de Bill est ramenée à Reggane par la Gendarmerie.
- 1975 Wylton Dickson va rechercher le SCM dans le Tanezrouft.
- 1979 Les autorités algériennes autorisent le retour de l’épave en Angleterre.
- 1980 Le SCM est exposé au Queensland Museum à Brisbane Australie.
- 2012 Mahammed MAHBOUBI commence ses recherches du point crash au Tanezrouft.
- Un rivet d’assemblage d’un capot est repéré par un des membres de l’équipe de Mahammed
- 2013 Mahammed MAHBOUBI repère au cours de ses recherches une pièce métallique.
Photo du SCM au Queensland Museum.
Sur cette vue il est possible d’observer l’empennage de l’avion qui s'est brisé.
J’ai reconstitué grossièrement la partie manquante de l’empennage.
La carte qui suit demande des explications. Ces informations seront fournies dès le retour de la prochaine mission de Mahammed et de son équipe sur la zone crash.
La zone qu’ils ont explorée est vaste, il leur fallut beaucoup marcher pour inspecter les alentours.
Ceci au risque de se perdre, ce qui faillit arriver à notre ami Cheikh, mais ceci est une autre histoire sur laquelle je n’anticiperai pas aujourd’hui.Avant de vous raconter dans un autre papier l’histoire des recherches réalisées par l’équipe de Mahammed dans des conditions parfois limite, je voudrais vous faire partager quelques magnifiques photos de ce Tanezrouft, aujourd’hui de plus en plus inabordable.
Actuellement il faut savoir que nombre d’autorisations sont indispensables pour pénétrer ce désert au-delà de la barrière de Reggane.
Note :
Début 2010 lors du raid initié par Jean-Jacques, alors qu’il allait poser son « papillon en contre-plaqué dans le désert », il fallut à l’équipe de « raideurs » qui remontaient de Tamanrasset, profiter du coucher du soleil éblouissant à l’horizon pour passer hors la vue du poste de garde du fort bien connu d'Ouallen.Les photos de Mahammed
Mahammed à chacun de ses voyages ne manque pas de passer saluer son ancien guide et ami, Monsieur Hadj HADDI.
Je laisse la parole à Mahammed quant à sa dernière visite à Tabelbala :
En décembre dernier, quand je lui ai montré la photo de LANCASTER sur un document….
ce vieillard du désert a marqué un temps comme s’il mettait la « machine » en arrière pour évoquer une journée mémorable de février 1962… Il y avait 51 ans… Puis Hadj brisa le silence (tout en regardant la photo de LANCASTER) en me disant que ce Monsieur (LANCASTER) devait être quelqu’un de bien.
Tel fut le témoignage de ce sage du désert qui fêtera bientôt ses 88 printemps dans la quiétude de l’oasis de Tabelbala.
Puis la route du Tanezrouft, en arrivant du Nord, passe déjà par Reggane et qui dit Reggane ne peut ignorer le Bordj Estienne désormais en cours de rénovation.
Voir également :
http://3emegroupedetransport.com/Regganaujourdhui000.htm
http://www.3emegroupedetransport.com/Regganaujourdhui61.htm
Cette photo nous montre l’entrée qui n’a plus rien à voir avec les photos qui illustrent les documents précédents. L’intérieur nous laisse à penser que les travaux de restauration sont loin d’être terminés. Actuellement le Bordj semble accueillir un souk style brocante.
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La route vers le Tanezrouft emprunte à la sortie de Reggane l’ancienne piste Impériale n° 2 qui prit par la suite le nom de Route de la Concorde. C’est aussi la direction de Bordj Pérez rebaptisé plus tard Bordj MOKHTAR.
Voir le document : http://www.3emegroupedetransport.com/LePK250.htm
La Route de la Concorde est devenue plus récemment la RN 06. Ce tracé qui rejoint le Mali est goudronné sur toute sa longueur, faisant oublier l’inconfort de la piste d’antan.
.Au PK 200, sous le contrôle des militaires, la halte est obligatoire. C’est à partir de cet endroit qu’il est nécessaire de donner à nouveau sa destination et les points GPS qui seront visités s’il s’agit de quitter la route. Les consignes sont strictes et formelles pour la sécurité de tous.
Ce relief assez remarquable se situe aux alentours du PK 200.
Puis il s’agit de partir vers l’inconnu, bien que d’autres soient déjà passés par là, mais qui ???
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Ensuite viennent en direction du point crash les grandes étendues de l’infini Tanezrouft où l’homme peut se sentir bien petit.
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Avec ses différents aspects du terrain, quand le Reg va s’imposer.
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Les rencontres sont parfois curieuses, mais elles se fondent dans ce décor où la vie reste fragile ! Ici un vieux Berliet, ailleurs des dromadaires à la recherche de pâturages.
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La mort dans ces traversées reste omniprésente si les règles de base de survie sont outrepassées.
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Le Tanezrouft est pour beaucoup le plus extrême des tombeaux et nombreux y sont restés dans le meilleur anonymat.Sans compter sur le passage inopiné de Titus Polidori apercevant au loin la carcasse du Southern Cross Minor, le Capitaine Lancaster aurait été oublié à tout jamais auprès de la carcasse de son avion dans la quiétude des sables chauds, sous l’embrasement du ciel qui reste un incontournable, spectacle que Mahammed n’a pas manqué de me rappeler…
Le trajet mérite aussi que l’on s’arrête pour se restaurer et prendre un peu de repos.
Et à chaque halte le souvenir de Bill est évoqué. Le souhait que faisait Bill alors que son âme accompagnerait le vent chaud de ce huitième jour, était de ne pas être oublié, disant : Il ne faudra pas conserver jalousement ce cahier. Il doit être lu …
D’aussi loin où il puisse être Bill ne peut que constater que sa volonté de ne pas être disparu le temps d’un souffle est des plus respectées.
Des endroits les plus reculés du Sahara, d’aucuns se remémorent la tragique histoire de l’homme qui avant de mourir, nous expliqua en deux mots ce que devait être la vie.
Des liens des plus forts se sont créés aux quatre coins du monde, grâce à Bill…
Au travers des différents écrits, filmographies, exposés, nous sommes toujours aussi nombreux à veiller sur la mémoire de celui qui voulut nous dire tout simplement à la fin qu’il avait été un gentleman !C’est pourquoi je me permettrai ici de lui rendre à nouveau hommage, tout simplement pour dire une fois encore que pas un instant je n’ai pu croire à sa culpabilité dans la sombre histoire de Miami.
Les couchers de soleil ci-après m’ont été gentiment transmis par Abdou.
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Cheikh évoque aussi la mémoire de Bill et en parcourant l’erg occidental, il s’arrêtera pour marquer le sable du prénom de Bill, je le remercie de cette pensée toute attentionée.
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Cette dernière photo réalisée par Cheikh nous montre un petit lézard du Tanezrouft qui vu d’aujourd’hui semble être un des rares gardiens de l’endroit où Bill disparu corps et biens, aux confins de ce désert.
Cheikh qui participe activement à cette « épopée » m’avait fait part de son sentiment :
Je pense que les mots laissés par Lancaster résument bien la réponse. À quoi, à qui, un homme peut-il bien penser sachant que sa fin est proche ? J’ai été, tellement, mais tellement, touché par l’histoire, sachant que je connais, un tout petit peu, ce que c’est que la soif, mais aussi la solitude, que j’ai fait mes propres expériences dans le Tanezrouft pour être le plus proche possible, de ce qu’a connu cet homme, mais, oh que, assurément, je suis resté trop loin de ce qu’a connu l’officier britannique. J’ai marché sous le soleil, je me suis éloigné de mes compagnons, je me suis retrouvé seul après une certaine distance, j’ai fait le tour complet pour ne voir que l’horizon... D’après moi et ce n’est que mon avis, ce qu’a connu cet homme, cet humain reste... (je ne trouverai de mots dans aucune langue). Son histoire est quelque part mienne, au point que durant cette dernière mission un sentiment des plus étranges (j’en ai parlé à Monsieur Mahboubi) m’a littéralement laissé dire : je vais le chercher de ce côté ci. Ce n’est pas le lieu de l’accident, mais le lieu de son agonie et de sa mort que je recherchais, je sentais que je le recherchais lui-même.
CHEIKHAu cours des recherches, il y eut aussi des surprises.
En effet Mahammed, repassant par le point JA (Jean Aubry), où Jean-Jacques avait posé son « papillon » suivi de peu par Maurice, il ne put que constater « l’envol du papillon ».
Voir : http://www.3emegroupedetransport.com/Montpellier.htm
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Seul le manche à balai était resté à cet endroit.
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Le papillon de contre-plaqué de Jean-Jacques sera sans doute utilisé désormais comme décor, trophée subtilisé au désert par un voyageur de passage.
Puis ce fut la découverte d’un des rivets de fixation d’un capot du Southern Cross Minor.
Voir : http://www.3emegroupedetransport.com/80ansapres.htm
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Il me reste à remercier chaleureusement ces aventuriers modernes qui au-delà de leur passion pour le désert, ont pris du temps pour rechercher un point de ce Tanezrouft où seule l’âme de Bill plane encore.
Je les salue ici « chapeau bas messieurs », car si le Capitaine LANCASTER fut un peu fou d’affronter l’immense SAHARA, si Wylton DICKSON fit de même plusieurs décennies plus tard, l’équipe de Mahammed mérite notre plus grand respect d’apporter leur savoir et nous faire part de leurs découvertes d’une tragédie qui se passa quatre-vingt- un ans plus tôt !MERCI À EUX …
Ce sera ensuite le retour vers REGGANE pour l’équipe de Mahammed.
Laissant comme toile de fond ce magnifique coucher de soleil.
Alain BROCHARD - Octobre 2014